L’ouvrage reprend les 6 conférences données par Pierre Manent à l’Institut catholique de Paris à l’invitation de la chaire Étienne Gilson. Comme point de départ, le contraste entre l’abandon de la vieille loi naturelle des Anciens – dans laquelle les humains pouvaient reconnaître un lien qui les surplombe – au profit de la multiplication des droits de l’homme qui consacrent leur séparation les uns des autres. Le parcours historique s’entame avec Machiavel et Luther qui ont en commun d’avoir rejeté tous deux la conscience pratique. Il se poursuit avec Hobbes, qui s’appuie sur la peur de mourir pour valider des droits démesurés qui ne se réfèrent plus à aucune moralité intrinsèque. L’erreur du droit naturel moderne est ainsi d’avoir produit du commandement (la loi) à partir de l’état de nature préalable au contrat social, c.-à-d. à partir d’une situation (imaginaire) où il n’y aurait pas de commandement. Le parcours aboutit à mai 68 où la souveraineté des droits individuels a aboli la loi. Voici l’individu vivant, sans cité ni raison, sentant et sensible, et la justice délivrée du souci de reconnaître la part de chacun, pour s’occuper plutôt du seul rapport à soi. Ainsi sont justifiés, p. ex., le mariage homosexuel, détaché de l’objectivité des sexes, ou, dans le domaine économique, le revenu universel, délié de la nécessité du travail, ou encore l’euthanasie, qui fait échapper à la loi de la mort. L’activité humaine est ainsi dérégulée, sous la seule contrainte de l’égalité des chances. En contraste avec cette évolution où l’être humain finit par ne plus savoir qui il est, l’A. propose que le gouvernement des hommes retrouve le chemin d’une loi naturelle appuyé sur un ordre objectif qui comporte l’agréable, l’utile et l’honnête. Un livre roboratif, en ce temps d’incertitude. X. Dijon