Archiprêtre dans une paroisse orthodoxe parisienne, l'A., fils du
théologien Paul Evdokimov, présente ici une nouvelle édition de son
étude consacrée à l'image du Christ reflétée dans la culture russe:
littérature, iconographie, tradition orale… Une première partie
couvre la période antérieure au XIXe siècle; elle est illustrée de
textes peu connus, traduits par l'A. Relevons: le 'martyre' de
Boris et Gleb, fils de Vladimir, fondateur en 988 de la chrétienté
russe; le pèlerinage de la Mère de Dieu dans les tourments (elle
obtient une relâche annuelle des châtiments infernaux entre Pâques
et Pentecôte); les sermons d'Hilarion (premier métropolite slave à
Kiev) et de Cyrille de Tourov (le plus célèbre prédicateur de la
Russie prémongole); l'Izmaragd (Émeraude), recueil de préceptes
inspirés de l'Évangile pour la vie de tous les jours; Nil de la
Sora, hésychaste; Dimitri de Rostov (+1709) et Tikhon de Zadonsk
(+1783), contemplateurs de la passion du Christ, qui ont inspiré
les poèmes spirituels (le songe de la Mère de Dieu; les pleurs
d'Adam…) des Kaljeki, infirmes ambulants. L'A. clôt cette première
partie par un essai d'explication sur le retard culturel de la
Russie durant toute cette période, un retard en partie comblé par
le langage des icônes, qu'on 'écrit' et qu'on 'lit' de gauche à
droite.
La deuxième partie de l'ouvrage est consacrée à la littérature du
XIXe s., siècle d'or de la pensée russe. L'A. en montre les racines
dans les yourodivyje, les fols en Christ, dont il décèle
l'influence dans les oeuvres de Pouchkine, Tolstoï, Dostoïevski. Il
explique en quel sens on peut parler d'un «Christ russe»
(Dostoievski). Un dernier chapitre évoque la présence du Christ
dans la vie quotidienne du peuple russe. Professeur de littérature
comparée, l'A. se réfère fréquemment à de nombreux auteurs
occidentaux: Pascal, Shakespeare, Kierkegaard etc. - P.-G.D.