Le désir de Dieu pour l'homme. Une réponse au problème de l'indifférence

Jean-Baptiste Lecuit
Théologie - Recenseur : Gonzague de Longcamp c.s.j.
Le rejet de l'idée du désir naturel de voir Dieu est pour Lubac, comme le montre l'A., la source de la fracture entre le message chrétien et le monde contemporain, d'où découle l'indifférence religieuse. Si la question du désir de Dieu est bien centrale dans notre relation à lui, il ne faut pas tant, pour répondre à la question de l'indifférence religieuse aujourd'hui, scruter le désir de l'homme pour Dieu que celui de Dieu lui-même pour l'homme. Ce diptyque du désir forme les deux parties de l'ouvrage.
Afin de renouveler l'approche de la question épineuse qu'est le désir de l'homme pour Dieu, l'A. tire profit des apports de la psychologie sur le désir comme configuration relationnelle et sa transformation, avant de regarder dans la Bible comment Dieu s'offre au désir de l'homme. Il est ainsi à pied d'oeuvre pour comprendre et critiquer la thèse de Lubac sur le désir naturel de voir Dieu.
C'est là que s'opère un renversement de perspective. L'indifférence religieuse ne viendrait-elle pas d'une perception de l'immutabilité divine qui serait une indifférence de Dieu à l'égard de l'homme ? Étant donné ce que l'on peut percevoir de la manière dont Dieu s'offre à l'homme, ne faut-il pas attribuer à Dieu un désir de notre salut ? Or, attribuer un désir à Dieu demande de visiter à frais nouveaux la tradition théologique. Ainsi, l'A. commence par rappeler les objections classiques à cette attribution, avant de parcourir les Pères, les auteurs médiévaux, St François de Sales et les théologiens jésuites, puis certains écrits pastoraux. Il en arrive donc à traiter la question essentielle : la perfection de Dieu exclut-elle ou implique-t-elle le désir ? (chap. 10).
Cet ouvrage est d'une grande densité. Il a l'audace de revisiter la doctrine commune sur la liberté et la prédestination avec perspicacité en proposant un changement de regard. La prise en compte de la structure psychique du désir et des écrits spirituels d'un François de Sales permet d'aborder la question théologique du désir avec des instruments nouveaux.
En refermant ce livre, on peut regretter deux choses. Premièrement, que la thèse que l'A. cherche à défendre forme parfois un prisme un peu déformant à la lecture de ses sources. Deuxièmement, même si l'A. connaît bien Thomas d'Aquin et le cite avec précision et respect, est-il légitime d'opposer ce qu'il appelle la vision métaphysique de Dieu à la vision biblique ? N'est-ce pas là une mécompréhension du travail théologique de l'Aquinate qui empêche de tirer de son enseignement tous les fruits que l'on pourrait ? - G. de Longcamp c.s.j.

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