Une autre Thérèse de Lisieux ! Carmélite dans cette ville et maîtresse des novices, Thérèse de Jésus (1925-1976), répondant à l’appel d’une contemplation en solitude, vécut quelque temps comme ermite au cœur de l’Inde hindoue. Après bien des péripéties et une année seulement après un début de réalisation de son projet, elle disparut de son ermitage au bord du Gange sans laisser de trace. Prêtre des Missions étrangères de Paris, Yann Vagneux a pu rassembler une abondante correspondance entretenue avec Henri Le Saux (Swami Abhishiktananda), moine bénédictin breton qui, une génération plus tôt, avait répondu à semblable appel. De 1959 à la mort de Le Saux (1973), ces lettres relatent l’apprentissage d’un détachement exigeant et d’un abandon à la volonté divine dans un silence ébloui.

Plusieurs thèmes s’y croisent : le devenir de la vie contemplative à l’époque de Vatican ii ; les tensions entre aspirations personnelles, vie de communauté et appartenance à un institut ; l’interprétation du charisme du Carmel ; la découverte des dimensions spirituelles des autres religions ; la vitalité des communautés chrétiennes de l’Inde mais aussi les lourdeurs héritées du passé ; les contraintes qui s’imposent à une personne étrangère et une femme dans la société hôte ; d’interminables négociations avec les autorités civiles et religieuses ; sans compter les épreuves de santé, l’apprentissage des langues et de la culture, la solitude. Les aléas du quotidien alternent avec l’évocation des nuits ou des éblouissements de la vie intérieure.

Sobrement annotée par Y. Vagneux, cette Correspondance offre une vive illustration des exigences de l’appel intérieur, d’une libre réponse faite de fidélité inventive, d’une disponibilité grandissante à la Présence. — J. Scheuer s.j.