Dans un style à la fois sobre et ferme, ce livre offre un parcours
réflexif très cohérent sur la vérité de l'amour humain, la
préparation au mariage, l'illusion de certaines options culturelles
contemporaines. Il est le reflet aussi d'un souci parental de
partager aux nouvelles générations une «tradition» concernant
l'amour et ses expressions de tendresse. «Comment leur dire combien
il est nécessaire de se donner d'abord le temps d'acquérir une
réelle maturité spirituelle et affective, indispensable à la
formation d'un couple durable, harmonieux et comblant?» (p. 5). La
composante «temps» n'est pas oubliée mais clairement mise en
évidence. Nous savons qu'elle n'est pas facile à intégrer dans le
développement relationnel et sexuel des jeunes, mais la
persévérance, la maîtrise de soi, la confiance ne surgissent pas de
«rien» et ne naissent pas si spontanément! Toute l'oeuvre éducative
est ainsi soulignée avec finesse. Que la période avant un
engagement définitif soit marquée de ces éléments ne devrait pas
surprendre. Et pourtant! La réalité est souvent différente: l'A.
développe longuement la symbolique des amours de jeunesse et de la
cohabitation juvénile pour en souligner les apories et les
faiblesses. Le passage concernant la «solitude» des jeunes et leur
«quête de tendresse» nous semble très éclairant (p. 29-31). Cette
dénonciation n'est qu'un premier pas: on lira avec goût le contenu
des «fiançailles» proposé par ce carme enseignant. Le contraste
avec la cohabitation n'en apparaît que plus fort et peut faire
souffrir certains lecteurs. Ce qui sous-tend la réflexion est la
valeur propre de l'engagement du mariage et ses conditions de
possibilité. Se marier n'est pas propre aux chrétiens, mais les
baptisés sont appelés à s'engager comme le Christ s'engage avec et
pour eux. Ainsi est mis en lumière le caractère de la liberté
spirituelle de ceux et celles qui se marient. Ce sacrement n'est
pas une coutume. Il est un défi: la liberté est comme au creuset de
la nature et de la grâce. D'où l'importance des actes qui nous
portent vers le bien: des «habitudes» qui rendent «réaliste» une
telle oeuvre d'amour. Les dernières pages sont suggestives et ne
laissent pas le lecteur tomber dans l'idéalisme car il s'agit de
«ne jamais s'avouer vaincu», de «prévoir et de bien mener son
combat», de ne pas vivre ce combat seul mais avec le Christ et dans
l'Église. Cette insistance sur ce combat spirituel dans le chemin
conjugal et familial ne doit pas décourager: elle montre la
profondeur de l'espérance qui anime tous ceux qui voient des jeunes
s'approcher de ce sacrement. Il est heureux de voir un carme
rejoindre ainsi la grande tradition des Pères Grecs et de la
spiritualité ignatienne. - A. Mattheeuws sj