Saluons la réédition bienvenue de deux anciens articles de la revue
Recherche de science religieuse (1910). Le contexte intellectuel de
l'époque était marqué par l'opposition entre rationalisme et
fidéisme; l'affirmation de Vatican I, sur la possibilité de
connaître Dieu par la raison, avait conduit certains à envisager
une «foi naturelle», sorte de préalable purement rationnel que la
«foi surnaturelle» viendrait alors simplement ratifier.L'A. se
propose de dépasser l'extrinsécisme d'une telle position. Il
montre, dans un premier temps, combien la connaissance de la foi
est proprement une grâce qui englobe et perfectionne les démarches
de la raison naturelle; le lumen fidei suscite l'activité
synthétique de l'intelligence, sa faculté d'assentiment, donnant
ainsi de saisir les faits comme signes de l'ordre surnaturel.Dans
un second temps, l'A. précise comment l'acte de foi est, tout en
même temps, libre et certain: la grâce élargit l'esprit humain en
lui donnant une connaturalité avec Dieu, ce qui permet une
connaissance par mode d'attrait ou de sympathie.La lecture de ce
petit ouvrage est exigeante, d'autant plus qu'il fait référence à
des théories subtiles et datées, mais dont l'A., précisément,
s'écarte pour mettre en valeur la vérité dans sa simplicité - comme
on le voit notamment dans les brefs parcours scripturaires qui
closent chacun des deux chapitres. La pensée de l'A. peut être
qualifiée de thomisme spirituel, présentant parfois des accents
pascaliens.Au final, ce texte garde une pertinence et une actualité
indéniables, proposant des pistes pour penser la «circularité»
entre foi et raison (cf. l'encyclique Fides et ratio, n. 73), mais
aussi pour réfléchir à la nature proprement théologale de l'acte de
foi dans le contexte multi-culturel qui est le nôtre. - M. Bernard