Lettre sur les synodes, texte critique, introd. et notes M. Durst, trad. A. Rocher (†)

Hilaire de Poitiers
Histoire de la pensée - Recenseur : Pierre Molinié s.j.

En 2021 sont parus aux Sources chrétiennes deux ouvrages importants pour l’histoire des dogmes et plus particulièrement pour la compréhension des débats relatifs à l’arianisme et à la réception du symbole de Nicée au ive siècle. Dans la Lettre sur les synodes, datée de 358-359, Hilaire se livre à l’explication du dogme de Nicée. Pour les évêques d’Orient hésitant à accepter le mot homoousios, il explique longuement le sens de ce terme de manière à éviter tout malentendu et en particulier tout soupçon de confusion entre le Père et le Fils. Il précise aussi pour quelle raison il est légitime d’utiliser le terme homoousios. Par ailleurs, pour des évêques occidentaux susceptibles de passer à côté des nuances de la théologie grecque, il commente cinq documents rédigés entre 341 et 358 : la formule hérétique de Sirmium (357) et les décrets des synodes des Encénies (341), de Sardique (343), de Sirmium (351) et d’Ancyre (358). Par l’explication minutieuse de chaque symbole de foi et de chaque anathème, Hilaire précise le sens des différents concepts utilisés (nature, essence, image…).

Dans le second volume sont présentées quatre lettres d’Athanase, écrites entre 362 et 372. Il s’agit entre autres pour lui de favoriser la réconciliation des chrétiens à Antioche, où le camp nicéen est lui-même divisé par un schisme ; mais au-delà de cette situation historique, Athanase suggère un chemin de dialogue entre deux courants. D’une part, une théologie des trois hypostases soupçonnée par certains de trithéisme ; d’autre part, une théologie de l’unique hypostase (comprise comme unique substance) prêtant le flanc à l’accusation de sabellianisme. Au fil du texte, tout en précisant le sens des mots-clés de la théologie trinitaire, l’évêque affirme haut et fort son refus d’ajouter « quoi que ce soit d’autre que Nicée » et répète ce que l’éditeur nomme un « slogan trinitaire » : « une unique divinité dans la sainte Trinité » (p. 125).

Pour l’un et l’autre ouvrages, on peut se réjouir de voir ainsi rendus accessibles des textes fondamentaux pour le développement du dogme christologique et trinitaire. Surtout, les introductions respectivement dues à Michael Durst (pour Hilaire) et à Annick Martin et Xavier Morales (pour Athanase) fournissent à la fois un commentaire théologique, capital pour comprendre les enjeux de tous ces débats, et une solide contextualisation historique (accompagnée d’une chronologie récapitulative dans le second volume – une bonne initiative, qui n’aurait pas été superflue dans le premier). On peut également apprécier l’hypothèse suggérée par M. Durst pour justifier le choix des textes par Hilaire (il s’agirait d’un dossier ayant servi lors des synodes d’Ancyre et Sirmium en 358), et déplorer au passage que ces deux synodes n’aient pas fait l’objet, comme les autres, d’un chapitre détaillé dans l’introduction. De manière générale, toutefois, l’étudiant ou l’enseignant en théologie saura gré aux éditeurs de leur permettre, à travers ces deux ouvrages, d’y voir un peu plus clair dans les méandres des synodes des années 340-360, et d’accéder à quelques très belles pages de l’un et l’autre auteur. — P. Molinié s.j.

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