Qu'est-ce qu'une société juste?, Semaines sociales de France. Actes de la LXXXIème session Paris-La Défense CNIT, 24-26 novembre 2006
Col.Morale et droit - Recenseur : Hubert Jacobs
Geneviève Médévielle présente l'enseignement social de l'Église sur la justice. Elle a le grand mérite de commencer son exposé par des considérations de méthode. Quel en est le corpus? Comment évaluer tradition longue et tradition courte? Quels auteurs retenir? Comment discerner des matériaux si composites? Résoudre tous ces problèmes serait une tâche impossible. Aussi en vient-elle à fonder sa réflexion sur l'étude de la lettre pastorale des évêques américains intitulée Justice économique pour tous. Certes marquée par la situation des années 1980, notamment par l'optique de l'administration Reagan, cette lettre est surtout importante pas son processus rédactionnel en plein coeur du débat nord-américain. Elle proposait une sérieuse interrogation éthique sur ce qui doit présider à la vie économique pour qu'une société soit juste et humanisante. Particulièrement stimulantes sont les pages où G.M. mesure la prise de distance de l'épiscopat américain vis-à-vis des théories les plus en vogue, celles de R. Nozick, M. Novak, M. Walzer, et surtout John Rawls.
Nous retrouvons ce dernier penseur dans la contribution de Philippe Van Parijs. Il y analyse les conditions de toute conception plausible de la justice aujourd'hui. À son avis, celle-ci «doit être à la fois libérale et égalitaire et comprendre cet égalitarisme d'une manière qui fait place tout autant à la responsabilité qu'à l'efficacité». Cela dit, Ph. V. P. évoque l'essentiel de la Théorie de la justice de Rawls et passe en revue les principales critiques qui lui ont été faites. Il en arrive alors à sa propre position. Pour lui, la question de savoir ce qu'est une société ou une nation juste n'est pas le meilleur point de départ logique pour traiter de la justice aujourd'hui. En réalité, c'est d'abord au niveau du monde dans son ensemble qu'il faut désormais poser la question de la justice. Ce qui est prioritaire c'est la question d'un monde juste.
Par l'exemple des deux contributions que nous avons évoquées le lecteur se rendra compte de l'intérêt considérable que peut susciter ce volume des Semaines Sociales. En particulier nous voulons signaler les 12 propositions qu'on y a proposées avec Bernard Ibal pour une société plus juste. - H. Jacobs sj