Questions Disputées: De l'âme, éd. J.-M. Vernier

Thomas d'Aquin
Histoire de la pensée - Recenseur : Albert Chapelle s.j.
Cette première traduction française des 21 Questions Disputées a été faite sur l'édition critique de la Commission Léonine par B.C. Bazan t. XXIV, 1 (1996). D'après cet éditeur, ces Disputes auraient été tenues à Sainte-Sabine en 1265-66 et «retravaillées durant l'automne 1266» (p. 11). Ces Questions se répartissent en trois séries de sept. La première traite de l'essence de l'âme humaine, la seconde de son union au corps, la troisième de son état une fois séparée du corps (cf. p. 11-14).
Ces Disputes supposent le Commentaire du traité de l'âme d'Aristote par Thomas (trad. fr. Vrin, 1999). Elles opèrent une reprise de l'aristotélisme dans la métaphysique de l'esse, à l'aide de Denys et du De Causis, en dialogue avec Averroës et Avicenne, à la lumière de l'Écriture Sainte. Les principes généraux de l'anthropologie thomiste se tirent de la «psychologie» d'Aristote: l'âme humaine, forme du corps, son union immédiate au corps comme l'acte à la puissance, la séparation et donc la subsistance de l'intellect d'avec tout organe, et son appartenance à l'âme. Mais cette anthropologie se fonde dans une métaphysique de la priorité de l'esse, de l'action créatrice de la Cause première. Cette métaphysique «rend possible l'existence de la connaissance par l'âme séparée grâce à l'influx des substances séparées»: de Dieu et de ses anges (p. 25).J.-M. Vernier présente une esquisse des vingt et une Questions (p. 14-28). Elle ne peut constituer qu'un point de départ de l'étude. Les Questions sur l'essence de l'âme (1-7) recèlent dans leur technicité une véritable doctrine de la personne, de sa singularité subsistante (hoc aliquid) qui possède en propre son intellect possible et son intellect agent, par lesquels elle s'institue objet et sujet de connaissance et d'amour. Les Questions sur la connaissance par les âmes séparées y compris des êtres singuliers («non cependant tous mais certains», qu. 20, p. 273) constituent un instrument approprié pour la théologie chrétienne; elles éclairent aussi les données thomistes de l'individuation et de l'intégration du sensible dans l'intelligence. La résurrection des corps qui n'est pas traitée dans ces Questions De l'âme, en apparaît métaphysiquement possible.
J.-M. Vernier a opté pour une traduction assez littérale du texte. Il n'a pas rédigé de glossaire, «préférant justifier en note la traduction adoptée lors de la première occurrence du terme» (p. 29). Les traductions choisies sont souvent judicieuses (ainsi comparare: rapporter). Intelligere (p. 49 n. 3) souffre-t-il les traductions aussi divergentes que «saisir intellectuellement, concevoir intellectuellement, appréhender, comprendre, concevoir, entendre»? Vu l'importance du terme dans le traité, la question paraît devoir rester ouverte. La traduction par l'A. de la Somme de Jean de la Rochelle (Vrin, 2001) enrichit l'introduction et les notes. Deviendrait-il possible d'étudier S. Thomas dans un texte français? - †A. Chapelle, S.J.

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