Un certain juif Jésus. Les données de l'histoire. V. Enquête sur l'authenticité des paraboles, trad. R. Sctrick

John P. Meier
Écriture Sainte - Recenseur : Sébastien Dehorter

De toutes les paraboles transmises par les évangiles, lesquelles vérifient les critères d’historicité conduisant à affirmer, avec une bonne probabilité, qu’elles ont été prononcées par Jésus lui-même ? C’est à cette question que s’attelle le 5e vol. de la monumentale enquête historique initiée il y a 20 ans déjà par J.P. Meier – cf. NRT 127 (2005), p. 325 pour le vol. 1 et NRT 129 (2007), p. 457 pour les vol. 2 et 3. Le corollaire est de mieux percevoir comment les paraboles retenues s’intègrent dans le cadre du Jésus historique dressé par les vol. précédents, à savoir celui d’un « prophète eschatologique » qui, à la manière d’Élie, a été « envoyé vers le peuple pour le préparer à la venue du Royaume définitif de Dieu » par une « exécution radicale de la volonté divine selon la Torah telle que lui-même l’interprète » (cf. p. 266). La conclusion principale de l’ouvrage, aussi imposant et renseigné que les précédents (269 p. de texte et 142 p. de notes), est pour le moins « anticonformiste ». En effet si, du temps de Jérémias ou de Dodd, les paraboles apportaient une « fondation historique particulièrement ferme » au Jésus de l’histoire, dès lors qu’à travers elles, pensait-on, le lecteur recueillait « avec une particulière clarté la nature de la Bonne Nouvelle » (p. 265), l’enquête menée ici conclut en revanche que sur la trentaine des paraboles synoptiques examinées, seules quatre d’entre elles passent le test de l’historicité ! Il s’agit 1) du « grain de sénevé » (critère de l’attestation multiple en Mc 4 et Q) ; 2) du « grand souper » (Mt 22,2-14//Lc 14,16-24) et 3) des « talents ou des mines » (Mt 25,14-30//Lc 19,11-27) (qui toutes deux se retrouveraient dans deux sources indépendantes, M la tradition propre de Mt et L la tradition propre de Lc) ; enfin 4) de la parabole des « vignerons homicides » (Mc 12,1-11 et //, dont l’historicité repose ici sur le critère d’embarras et de discontinuité). Ainsi énoncée, cette conclusion amène aussitôt deux précisions. La première est que le fait même de l’enseignement de Jésus en paraboles n’est en aucun cas nié. Son attestation par des sources littéraires indépendantes le rend historiquement certain. La deuxième est que pour la plupart des paraboles, l’application rigoureuse des critères d’historicité (mis en place par l’A. dès son 1er vol.) conduit tout simplement à ne pas pouvoir trancher pour au contre leur rattachement au Jésus de l’histoire ; autre chose, bien entendu serait d’affirmer péremptoirement que Jésus ne les a pas prononcées. Cela étant dit, le lecteur – tellement habitué à associer à la figure historique de Jésus les si belles paraboles de la Miséricorde ou encore celle du Bon Samaritain (l’A. montre que cette dernière est une pure création de L, marquée au sceau du lexique et de la théologie lucanienne, cf. p. 152-165) –pourrait être découragé de poursuivre sa lecture. Mais lisons-nous des livres pour être confortés dans nos idées toutes faites ou bien pour recevoir, comme le dit F. Kafka, comme des coups de hache sur une mer gelée ? Quant aux deux derniers volumes annoncés, portant, l’un, sur les titres de Jésus et, l’autre, sur les raisons de son procès et de sa mort en croix, ils devraient eux aussi nous réserver de nouvelles surprises. Qui vivra lira ! — S. Dehorter

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