Unanswerable Questions. Ambiguity & Interpersonhood

Andrew Porter
Théologie - Recenseur : Markus Kneer

Dans un temps où un certain type de philosophie et de théologie prétexte qu’on peut analyser la transcendance clairement, on se réjouit de trouver un auteur qui met cette conviction en doute sans laisser tomber la rigueur scientifique. Cet A., Andrew Porter, a été physicien avant de donner des cours en philosophie et en théologie à la Graduate Theological Union et en d’autres institutions de la baie de San Francisco. Son livre porte sur la question de savoir comment on peut se rapporter raisonnablement à Dieu, soit sur le niveau interpersonnel, soit sur le niveau langagier.

Dans le chap. 2 (« Personnes »), il débute par une critique de la vision heideggérienne de l’altérité dans Être et temps qui n’arrive pas à développer la dimension ontologique de l’être-avec pour le Dasein. Mais dans la structure de l’existence personnelle, l’autre est déjà toujours présent ainsi que l’A. peut le montrer avec la sociologie du savoir, Kierkegaard (le Tout Autre, Dieu !), Niebuhr, Rahner, Buber, Zizioulas (on doit ajouter, en premier rang de cette liste, Karl Löwith, le philosophe allemand et disciple de Heidegger, et son ouvrage Das Individuum in der Rolle des Mitmenschen). Et grâce à cette présence des autres personnes qu’on ne peut pas nier, l’A. peut introduire son concept des « questions auxquelles on ne peut pas répondre » (« unanswerable questions ») : comme pour les personnes humaines qui sont là mais dont l’existence évoque encore des questions « auxquelles on ne peut pas répondre », il y a d’autres questions (qui commencent avec « pourquoi » et se dirigent vers Dieu ou la transcendance) du même ordre. On ne peut pas répondre à ces questions comme d’habitude : « Il est légitime de constater que la logique du questionnement a changé ici » (p. 37). Sur le plan langagier, on pose ces questions pour recevoir une instruction sur notre mode d’être dans le monde. Et je ne peux pas répondre moi-même, je dois les poser à une autre personne.

Même si l’A. est très critique envers une philosophie et une théologie analytiques trop sûres d’elles, il est malgré tout très conscient de l’importance de la langue pour notre relation au monde : « Nous pouvons parler sur des choses dans le monde, mais elles nous sont données comme choses dans le monde seulement par le langage » (p. 7). Mais il y a dans la langue aussi une résistance contre une clarté trop totalitaire : son ambiguïté, et par-là son ironie. Ça ne signifie pas que la langue ne peut être claire, mais elle ne l’est pas dans tous les cas. Dans quelques cas décisifs – décisifs pour mener notre vie – la langue reste ambiguë, et par-là nous devons savoir nous y prendre avec cette ambiguïté, aussi avec cette notion ambiguë de « Dieu ». Ce livre, comme vrai « Essay » anglais, est très suggestif et on a envie de découvrir d’autres livres d’Andrew Porter (The Accountant’s Tale, Basic Concepts of Biblical Religion, Living in Spin, etc.). — M. Kneer

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