Une amitié sacerdotale. Jules Monchanin - Édouard Duperray 1919-1990

Françoise Jacquin
Histoire - Recenseur : Bernard Joassart s.j.
Voici certainement un beau livre, construit autour de l'édition de la correspondance échangée entre les deux protagonistes, et plus précisément de 66 lettres sur 101 envoyées par Monchanin à Duperray, celles de ce dernier n'ayant pas été conservées. Inutile de rappeler la carrière des deux hommes, qui comptent parmi les fondateurs de ce qu'on appelle de nos jours le dialogue interreligieux. Il est sans doute plus intéressant de souligner qu'à travers les textes édités, on perçoit combien Monchanin et Duperray ont su manifester leur souci d'une compréhension de l'intérieur des mondes religieux, indien et chinois, qu'ils rencontrèrent, tout en demeurant profondément attachés à leur foi catholique et à toute sa tradition, ne cessant jamais d'en approfondir la connaissance (M. n'arrête pas de lire les grands théologiens et les grands mystiques chrétiens), demeurant attentifs aux grands courants traversant la vie de l'Église de l'époque («Nouvelle théologie», prêtres ouvriers, etc.) et plus largement encore à tous les courants intellectuels du temps (il suffit de rappeler leur amitié profonde avec un Max Jacob). Ou si l'on préfère, même dans le cadre d'un apostolat bien spécifique, ces deux prêtres ont su préserver un intérêt universel. En un temps où l'ouverture aux autres religions est une priorité du catholicisme, on ne peut donc que se féliciter de ce retour aux sources.
Cela étant, il me semble que la beauté du sujet aurait mérité un livre d'une meilleure facture, étant bien entendu que l'édition d'une correspondance n'est jamais une entreprise aisée. On admettra sans aucune difficulté que l'A. n'ait pas voulu éditer certaines lettres qui touchent à la direction spirituelle de personnes encore vivantes: une discrétion élémentaire s'imposait. L'édition des lettres enchâssées dans le récit n'est pas toujours du meilleur effet: de nombreux textes sont très longs. On peut se demander s'il n'aurait pas été préférable de regrouper tous les documents dans une partie spécifique et de bâtir le récit en y incluant des extraits significatifs. Peut-on aussi se résigner à une annotation relativement sommaire, d'ailleurs ainsi voulue par l'A.? Un examen attentif lui aurait sans doute épargné des coquilles tout à fait évitables… Deux exemples: on sera sans doute étonné d'apprendre que Godefroid Kurth est le «fondateur de l'École historique belge» (note 27, p. 78), ou de rencontrer un certain «P. Goffier - bollandiste belge» (p. 102), en qui, grâce à son éditeur belge, l'A. aurait pu aisément reconnaître le P. de Gaiffier! La parcimonie est d'ailleurs parfois telle que le lecteur doit bien connaître l'époque pour éviter de passer à côté de certaines données importantes. Enfin, dans un tel ouvrage, la table des matières doit nécessairement comprendre un relevé des lettres éditées, surtout si celles-ci ne sont pas regroupées dans une partie spécifique, ce qui ne peut qu'aider à suivre les relations entre les correspondants.
Un beau livre - on ne peut qu'insister à nouveau sur ceci - que l'on a grand plaisir à lire, mais qu'on aurait également eu plaisir à voir un peu plus ciselé. - B. Joassart, S.J.

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