Grec catholique, capucin et professeur de théologie orientale à
Rome, Y. Spiteris a été nommé en 2003 Archevêque de Corfou et
Vicaire Apostolique de Thessalonique. Il nous a ouverts au courant
grec de l'orthodoxie, moins bien connu en Occident que le courant
russe. La théologie grecque ne s'est réveillée qu'après 1821, fin
de la longue domination turque. Dans cet ouvrage, Spiteris
confronte l'ecclésiologie grecque à celle des catholiques. Il y a
déjà 40 ans, on faisait remarquer que l'ecclésiologie orthodoxe se
trouvait encore dans un état pré-théologique parce que la théologie
orthodoxe ne possède pas d'enseignement officiel sur l'Église.
Chaque théologien a ses idées personnelles sur le sujet qui reste
délicat par suite de l'indépendance des Églises nationales.
Spiteris regroupe ici quelques-uns de ses articles sur le sujet
pour mieux nous faire comprendre les problèmes posés en
ecclésiologie par l'orthodoxie, surtout grecque. L'A. définit
d'abord le mystère de l'Église et les trois points communs avec les
catholiques: la Trinité, la christologie et la pneumatologie. Puis
il divise son livre en trois parties dont la première, la plus
importante, porte sur les éléments ecclésiologiques présents dans
l'orthodoxie. Il y signale deux grands courants, l'un patristique
et plus conservateur, est basé sur l'incarnation qui réalise le
projet éternel de Dieu de sauver tous les hommes; le second courant
propose une ecclésiologie eschatologique qui ne trouvera sa
plénitude que dans le futur et elle insiste sur l'Église locale
rassemblée autour de l'eucharistie. C'est le Métropolite Zizioulas
qui défend le mieux ce second courant. Spiteris expose les vues de
ce dernier à partir des notes de cours du théologien qui expose
sans fard ses idées à des étudiants orthodoxes. La deuxième partie
tente de comparer les critères d'ecclésialité catholiques à ceux
des orthodoxes grecs. Spiteris y souligne l'importance des faits
historiques qui ne cessent de rester présents dans la mentalité
grecque. Plus délicate, la troisième partie aborde le problème de
la papauté et les motifs historiques et idéologiques qui ont
engendré les critiques orthodoxes. On revient toujours avec les
motifs socio-politico-religieux du temps de Byzance. Les Grecs
restent accrochés à la thèse de l'hérésie catholique provenant du
Filioque, ce qui, selon le critère de saint Cyprien, empêche les
latins d'être une véritable Église. Seul le théologien orthodoxe
Evdokimov (†1970) ne niait pas l'ecclésialité d'Églises
non-orthodoxes. Spiteris nous aide à avoir des idées plus justes et
moins simplistes sur l'orthodoxie. Il rappelle opportunément
l'importance de l'histoire dans le dialogue oecuménique et le
caractère capital de la distinction récente, à propos de la
justification, entre l'essentiel des dogmes et l'accessoire
provenant des cultures différentes. Les orthodoxes ont raison de
dire que la papauté a évolué au cours des temps, mais les
patriarcats eux aussi. Et comment va-t-on discerner la valeur des
diverses traditions?, etc. Spiteris pose ici des jalons pour
faciliter un vrai dialogue, mais il restera toujours malaisé. - B.
Clarot sj