L'usage du terme Israël dans l'évangile de Matthieu autorise-t-il à parler de « rejet » des Juifs dans la conception de l'Église, peuple de Dieu ouvert aux nations ? L'article confronte l'originalité narrative du premier évangile aux lectures historiques qui en ont été faites. L'examen des termes Israël, peuple, juif, Église, nation et de Mt 8,11-12 ; 21,43 ; 27,25 permet de comprendre comment la nouveauté du Christ manifeste la fidélité de Dieu envers son peuple : le premier lieu de l'Église est Israël.
Le destin douloureux des Juifs d’Europe comme l’existence actuelle d’un État juif au Moyen-Orient donnent au nom d’Israël de nouvelles connotations. La communauté catholique qui prononce ce nom trois fois par jour dans sa prière2 doit indéniablement en tenir compte. Comment porter le nom d’Israël, comment le prier aujourd’hui ? Si personne ne nie la polysémie qui lui est attachée, l’accord paraît moins immédiat quand il s’agit d’en préciser la portée ecclésiologique.
Le christianisme n’a d’ailleurs pas manqué de glisser vers une lecture où la forme ancienne du peuple de Dieu pouvait s’opposer à sa condition nouvelle. Par le jeu facile des contrastes, le passage à l’Église se comprenait comme un remplacement, une substitution. Le monde ancien devait disparaître, avec les Juifs, le temple et Israël ; un monde nouveau s’était levé,…