Avec ce 4e tome - réalisé selon les principes adoptés pour les
trois précédents (cf. NRT 131/3, 133/2) -, P. Lenain convie à la
rencontre de 273 mauristes érudits pour les 63 années concernées
(ils étaient 272 pour les 40 années du 3e tome). Non seulement il
permet de connaître chaque moine qui d'une manière ou d'une autre
oeuvra dans divers domaines du savoir, mais, comme le fait
remarquer le préfacier, il constitue aussi une porte d'entrée dans
l'histoire de la Congrégation. Ces six décennies se révèlent bien
moins riches en production. Le travail intellectuel, en particulier
l'érudition historique dont un Mabillon jugeait qu'elle était «le
travail du coeur, de la charité et de la vérité», est comme mis en
veilleuse. Peu d'histoire, peu de théologie, pas de philosophie…
Les raisons? Les fondements de la vie conventuelle connaissent un
certain relâchement. D'autres tâches sont confiées aux moines:
d'aucuns reprennent les collèges jésuites après la disparition de
la Compagnie, d'autres sont chargés d'administrer les bibliothèques
confisquées aux fils de St Ignace. Faut-il y ajouter l'air du
temps, celui des Lumières, qui n'était pas bien fait pour se livrer
aux études à caractère religieux? Rien ne permet de l'affirmer de
manière catégorique, même si l'on peut constater que le
cartésianisme est bien présent dans l'esprit de plus d'un
religieux. Sans oublier que certains termineront leur vie dans la
tourmente révolutionnaire et même adhéreront aux principes
nouveaux. Mais, in fine, si toutefois certains mauristes demeurent
des ouvriers de valeur, ne peut-on envisager que, comme c'est le
cas de plusieurs entreprises de ce type, après une période de
grande prospérité, suit, presque inévitablement, une époque moins
productive: la grandeur des glorieux prédécesseurs peut effrayer et
ne favorise pas le renouvellement; la routine s'installe; plus
encore, on ne croit plus nécessairement à l'intuition originale et
géniale des pionniers.
J. de Viguerie termine sa préface en disant qu'il faudra attendre
Dom Guéranger et la congrégation de Solesmes pour retrouver une
semblable entreprise; il précise:«l'esprit des études est le même.
C'est l'esprit de Mabillon et de ses émules. C'est l'union de la
charité et de la vérité, comme la voulait l'auteur du Traité
des études monastiques.» Ce n'est pas le lieu de discuter
pareille assertion. Il serait à coup sûr de mauvais aloi de mettre
en doute les bonnes intentions d'un Guéranger, mais on peut
s'interroger si, à contexte certes très différent, un Mabillon se
serait retrouvé dans l'esprit de celui-là. - B. Joassart sj