L'expérience de Dieu chez Karl Rahner. Son statut épistémologique dans le Traité fondamental de la foi
David SendrezThéologie - Recenseur : Emmanuel Tourpe
Pour mettre au jour une conclusion de cette portée, l'A. a recours à une interprétation pour le moins originale : il considère que l'expérience transcendantale de Dieu serait une « abstraction heuristique », une sorte d'idéal-type à la façon kantienne, mais qui serait tirée d'une compréhension à caractère mystique de Dieu. Cette expérience ne serait pas réellement immédiate, mais, au contraire, elle introduirait la médiation dans le rapport à Dieu : elle serait fondatrice de l'éveil de la conscience au monde et à soi, dans laquelle réflexivité se découvrirait l'amour de Dieu. « Je ne me comprends bien qu'ainsi, référé à ce mystère personnel, c'est-à-dire comme mystère référé au Mystère » (p. 636). L'ouvrage se déploie en trois parties. La 1re, qui aurait suffi à satisfaire un jury de thèse, vise à déployer une telle proposition de lecture du Traité (p. 33-214). Une 2epartie scrute les profondeurs rahnériennes de « l'expérience de Dieu » dont il est question (p. 215-494). On y notera avec faveur la discussion avec Balthasar (p. 379s), ainsi que l'invention des sources mystiques de Rahner (p. 321s). La 3e et dernière partie développe en propre, intéressant cette fois les philosophes, l'épistémologie théologique du Traité (p. 496s). Plusieurs points seraient à discuter dans cette section, comme l'insuffisance de certaines références, mais l'A. a le bon goût de l'assortir d'une évaluation critique du Traité d'une grande intelligence. Ce n'est à coup sûr pas un ouvrage banal que celui-ci ; et davantage que sur Rahner, il nous en dit long sur la puissance et les capacités théologiques de son auteur. - E. Tourpe