L'origine religieuse des droits de l'homme. Le christianisme face aux libertés modernes (XVIIIe-XXIe siècle)
Valentine ZuberMorale et droit - Recenseur : Bernard Joassart s.j.
V.Z. a donc mené une enquête minutieuse, dans l'univers protestant et dans l'univers catholique, afin de voir comment cet article y trouvait des racines et comment il y fut reçu. Si le monde protestant fut plutôt enthousiaste à l'accepter, y voyant une expression authentique de la foi chrétienne, il n'en alla pas de même dans l'univers catholique qui, plus généralement, y vit une contradiction avec le contenu de sa foi, comme d'ailleurs il s'opposa vigoureusement à toute la Déclaration, avant d'être, surtout depuis le pontificat de Jean-Paul ii, un fervent partisan de la liberté religieuse.
L'ouvrage est particulièrement dense et exige une attention soutenue de tous les instants. Ce n'est point là une critique, car au fur et à mesure de la lecture, on est amené à percevoir qu'un tel article est loin précisément d'être un parmi d'autres. Car, derrière le contenu religieux, il y va de la conception de l'homme et de sa vie en société, y compris quant à son insertion dans un État qui, bon gré mal gré, doit prendre en considération le côté religieux de l'être humain.
Beaucoup de choses pourraient être discutées. Ce qui me paraît toutefois devoir être relevé est que le lecteur doit être attentif aux mots, et dès lors à leur contenu, et à un contenu qui doit toujours être compris dans son contexte, et que ce dernier peut fortement varier selon les époques. Quiconque s'intéresse de près à cette « liberté » ne peut manquer de voir que derrière ce terme s'en profilent d'autres : foi, opinion, culte, religion, etc., et qu'il n'est pas si aisé qu'on ne pourrait le croire de comprendre ce qu'est la « liberté de culte » et la « liberté religieuse », d'autant plus que partisans et adversaires (pour faire court) usent d'un même langage qui ne recouvre pas les mêmes réalités dans leur chef respectif.
Et que dire alors, lorsque cet article, conçu en terreau chrétien, se trouve confronté à une religion qui n'est pas de même contenu que le dogme chrétien, voire à une société qui n'envisage même pas qu'une place puisse être faite à n'importe quelle forme de religion ?
Quoi qu'il en soit, ce livre mérite qu'on s'y arrête. Il est parfois ardu à lire, on l'a dit plus haut. Pour ma part, en plus de la richesse de la documentation qu'il fournit au lecteur, il me semble qu'il porte en lui-même la leçon suivante : quand une société ou un État se mêle de parler de religion - au sens large - et surtout entend réglementer en la matière, il ne touche jamais à un sujet anodin. - B. Joassart s.j.