Ce dialogue entre Claude Geffré et Gwendolin Jarczyk se divise en
quatre parties. La première est une sorte d'introduction: elle
présente le dominicain, directeur de l'École biblique et
archéologique de Jérusalem. La dernière est une «conclusion
utopique» sur une unité polyphonique. Les deux autres parties
constituent l'essentiel du livre. Celui-ci est un effort pour
décrire l'oeuvre du théologien et son travail de pensée dans un
monde qui s'ouvre à l'oecuménisme entre Églises chrétiennes et,
plus largement, entre toutes les religions du monde. Les auteurs du
dialogue n'ignorent pas combien leur démarche aborde un terrain en
grande partie inexploré et largement miné. Aussi procèdent-ils avec
un grand souci de définir leurs pas en avant et d'en préciser la
portée, à une époque où la théologie tend à devenir une
herméneutique plus soucieuse de comprendre et d'interpréter que
d'affirmer massivement des vérités, comme le faisait l'ancienne
théologie dogmatique. Ils se savent l'objet d'une attention
vigilante des instances romaines. Ils ont conscience aussi que,
comme toute institution, celle-ci remarque plus facilement les
à-peu-près et les faux pas rarement évitables par ceux et celles
qui explorent de nouveaux domaines. Ils savent qu'il leur faut
avancer à leurs risques et périls, en espérant que, s'ils
trébuchent, ils trouveront quelqu'un pour les aider à se relever
plutôt que pour contribuer à les abattre. Ils se rendent compte
aussi que le péché d'omission qui consiste à répondre aux problèmes
d'aujourd'hui avec les réponses valables pour hier, est plus grave
et plus dangereux pour l'Église, même s'il est moins facile à
détecter.
On lira avec grand intérêt ces pages, qui témoignent chez leurs
deux auteurs d'une remarquable connaissance de l'évolution de la
théologie, des systèmes philosophiques et des mouvements religieux
de notre époque. On nous permettra toutefois une remarque. On peut
certes écrire: «on n'aura jamais de démonstration satisfaisante de
l'existence de Dieu et… nous ne pourrons répondre qu'au nom de la
foi» (p. 40), car l'existence de Dieu ne sera jamais la conclusion
d'un raisonnement apodictique et le Dieu chrétien fera toujours
l'objet d'une révélation. Mais il nous paraît essentiel, à la suite
de Joseph Maréchal († 1944) dans sa réfutation de Kant, de
maintenir que l'esprit humain est nécessairement ouvert sur
l'Absolu, car l'activité du jugement ne lui est possible que sous
l'attrait de cet Absolu. Certes ce «point de départ» n'impose aucun
système métaphysique déterminé, mais il exclut que l'on se dispense
d'en avoir un. Est donc à rejeter toute présentation purement
phénoménologique de croyances offertes au libre choix de chacun. -
L. Renwart, S.J.