Construction of Mysticism as a Universal. Roots and Interactions Across Borders

(éd.) Annette Wilke (éd.) Robert Stephanus (éd.) Robert Suckro
Religiones - reviewer : Jacques Scheuer s.j.

Mystique ou mysticisme : peu de termes, tant dans le langage courant que dans les publications scientifiques, expriment ou plutôt masquent autant de conceptions diverses et le plus souvent brumeuses. Sans prétendre fournir une définition… définitive, la vingtaine de participants au colloque Constructions of Mysticism (Münster 2013) et à la présente publication se proposent de reprendre le volumineux dossier de la mystique de façon mieux informée et plus équilibrée. L’origine occidentale et l’histoire chrétienne de ces termes permet-elle de les étendre à des phénomènes enracinés dans d’autres civilisations ? De tels phénomènes renvoient-ils à une dimension que l’on puisse reconnaître comme universelle et transculturelle ou plutôt à des réalités hétéroclites et incomparables ? Et, même à s’en tenir à l’aire européenne, ces termes ne couvrent-ils pas des élaborations voire des « constructions » en perpétuelle évolution ? Telle est la problématique qui unifie ici des contributions relevant de disciplines différentes et appliquées à une diversité de contextes.

Dans leur majorité, leurs auteurs entendent dépasser la controverse furieuse qui a sévi dans les années 1970 et 1980 entre les tenants (presque honteux) d’une conception universaliste, essentialiste ou encore pérennialiste, et les partisans (alors victorieux) d’une compréhension contextualiste, constructiviste, culturaliste ou encore relativiste. Ces polarités exacerbées en entrainaient d’autres : expérience immédiate ou médiatisée, expérience pure ou interprétation, tensions entre apophatisme et discours théologiques… À présent que la poussière est retombée sur le champ de bataille, on observe un certain retour à des enquêtes et des analyses plus nuancées. Chacune des contributions à ce volume se recommande par son apport particulier tout en enrichissant et en complexifiant le tableau d’ensemble. Selon les cas, l’attention se focalise davantage sur la description des expériences mystiques par celles et ceux qui les ont vécues ou sur les outils conceptuels destinés à les interpréter (sans oublier les inévitables interférences entre ces deux approches).

Réparties en cinq sections, les contributions abordent notamment les domaines d’expérience et/ou les instruments d’analyse suivants : i. le néoplatonisme « païen » et chrétien, les dimensions sensuelles et affectives dans la mystique patristique et médiévale, l’apport des béguines, la découverte chrétienne de la Kabbale puis du soufisme ; ii. le surprenant renouveau de l’intérêt pour la mystique à la fin du xixe siècle européen, l’idée d’un « troisième règne » ou ère de l’Esprit (de Joachim de Fiore à Lessing et Hitler), les apports de Martin Buber et de Vladimir Lossky ; iii. les élaborations académiques du début du xxe siècle : Max Weber, Ernst Troeltsch, Max Scheler, le jeune Eliade, la mystique chrétienne comparée à celles de l’hindouisme (Rudolf Otto) et du bouddhisme (Shizuteru Ueda) ; iv. la tradition nord-indienne des Sant, les premières présentations du bouddhisme au public occidental (est-ce une mystique ?), le taoïsme chinois (mysticisme ou manipulation rituelle ?) ; v. enfin, en contexte « postmoderne » : le recours aux substances psychédéliques, les activités de deux maîtres hindous vedantins en Occident. Que R.C. Zaehner, professeur à Oxford, soit devenu catholique n’en fait pas pour autant un jésuite (p. 401). – J.S.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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