Voilà à coup sûr un ouvrage de qualité. La pièce maîtresse est
constituée des notices biographiques de près de 700 prélats ayant
exercé le ministère épiscopal en France au cours du siècle dernier,
étant entendu que ce ministère a pu commencer au xixe siècle (mais
ont été exclus les évêques décédés avant 1906) et que bon nombre
d'évêques sont encore en charge de nos jours. Précisons également
que les promus jusqu'en 2009 trouvent leur place dans l'ouvrage.On
comprendra aisément que les notices sont d'inégale longueur. Dans
un tel ensemble, il y a les «grands formats» et les obscurs, ceux
qui ont déjà été longuement étudiés ou qui mériteraient de faire
l'objet d'une biographie car il est évident qu'ils ont marqué leur
époque de leur empreinte, et ceux qui n'ont guère ou pas attiré
l'attention des historiens ou qui n'ont pas fait grandement parler
d'eux au cours de leur carrière. Sans oublier que les prélats
actuellement en charge ne sont de toute évidence pas encore
justiciables de l'histoire, sauf à connaître leur parcours jusqu'à
nos jours et éventuellement quelques caractéristiques qui les ont
déjà fait remarquer.L'ouvrage est en outre pourvu d'une salve
d'annexes qui sont pour le moins les bienvenues. Après plusieurs
cartes qui donnent la répartition des évêchés et des archevêchés de
1905 à 1961, puis cette répartition en fonction des régions
apostoliques (1961-2002) et selon la toute récente géographie des
provinces ecclésiastiques, vient la liste des anciens sièges
relevés, puis celles des évêques par diocèse, par date de
nomination, par département de naissance, et selon leur parcours
épiscopal. La septième annexe - «L'épiscopat français: nominations
et fonctionnement» - permet d'avoir une première approche des
rouages de ce corps particulier, notamment à propos de l'Assemblée
des cardinaux et archevêques (ACA), sorte d'embryon de la
conférence épiscopale créée au lendemain de Vatican II. L'annexe 8
donne un relevé des cardinaux français depuis le consistoire de
1907 jusqu'à celui de 2007 (la plupart sont évidemment présentés
dans la partie principale de l'ouvrage). L'annexe suivante fournit
la liste des «autres évêques français (Saint-Siège et diplomatie)»
(les noms sont accompagnés d'un curriculum vitae sommaire). Puis
sont présentés les nonces apostoliques à Paris (les notices sont du
style de celles réservées aux évêques), suivis de la liste des
ambassadeurs de France près le Saint-Siège. La dernière annexe est
consacrée aux «évêques missionnaires, évêques en charge à
l'étranger au xxe siècle» (avec un curriculum vitae sommaire). Une
bibliographie sélective et l'index nominum sont précédés par un
«glossaire» présentant des termes techniques (consécration
épiscopale, crosse, évêque auxiliaire, pallium, vicaire général…)
ou des réalités qui ont marqué la vie de l'Église de France (ACJF,
Action française, communautés nouvelles, Séminaire des Carmes,
Séminaire français de Rome…); voilà qui est fort heureux, en
particulier à une époque où la culture religieuse se dissout à
grande vitesse. Au terme de cette description, peut-on trouver des
«défauts» à un tel instrument? Plus que vraisemblablement, à
l'usage, sera-t-on amené soit à repérer des lacunes (les
co-directeurs eux-mêmes reconnaissent en être bien conscients),
soit à formuler des regrets. Pour ma part, il me semble qu'il
aurait été bon d'indiquer dans le bref CV qui introduit chaque
notice la mention de l'éventuelle date d'élévation au cardinalat.
D'autre part, il aurait été bienvenu d'être plus explicite à propos
des personnages signalés dans les listes des cardinaux français
(tous ne furent certes pas consacrés évêques soit parce que cela
n'était pas requis au moment de leur création, soit qu'ils aient
obtenu la dispense de recevoir cette consécration) et des autres
évêques français, du moins quant à certains, tels un Baudrillart ou
un Daniélou qui n'exercèrent point le ministère épiscopal à
proprement parler, mais n'en jouèrent pas moins un certain rôle
dans le «gouvernement» ou en tout cas dans la vie de l'Église de
France. Mais on aurait mauvaise grâce à être chagrin. Un tel
instrument existe (qui comprend d'ailleurs un fort complément de
près de 100 photos qui donnent une bonne idée de l'évolution de ce
qu'était un évêque) et qui n'a rien à envier à d'autres ouvrages du
même genre consacrés à d'autres «professions». Il ne fait aucun
doute qu'il rendra d'éminents services et plus encore qu'il
suscitera des recherches plus approfondies. Sans oublier qu'il fait
souhaiter de semblables réalisations pour le xixe siècle et pour
d'autres pays. Redisons-le: un ouvrage de qualité! - B. Joassart sj