Do not follow this hidden link or you will be blocked from this website !

Le pape François et la synodalité. Evangelii gaudium, nouvelle étape dans la réception de Vatican II

Luc Forestier
Avec l’Exhortation apostolique Evangelii gaudium (24 nov. 2013), le pape François met en œuvre une nouvelle étape de la réception du concile Vatican ii, à la suite de ses deux prédécesseurs. Non seulement Vatican ii reste une « boussole » pour l’Église, mais sa mise en œuvre passe par la réforme de l’Église, avec une insistance nouvelle sur la synodalité propre au christianisme. Expérience de lecture des Écritures à l’intérieur de la diversité des cultures par toute l’Église, cette synodalité repose sur la responsabilité des évêques et de leurs collaborateurs. Elle reste la condition d’une authentique « sortie missionnaire ».

L’Église catholique vit actuellement une période tout à fait singulière. La couverture médiatique continue dont bénéficie le pape François, qui n’est pas avare de gestes spectaculaires, peut masquer certains enjeux profonds de l’exercice du ministère pétrinien, notamment liés au concile Vatican ii. Celui-ci a certes servi de point de comparaison au Synode extraordinaire consacré à la famille, et pas seulement par les journalistes. Or, la renonciation de Benoît xvi en 2013 a fait disparaître de la scène un acteur tout à fait essentiel de Vatican ii. Par ailleurs, François, contrairement à ses prédécesseurs, s’exprime peu sur le concile, alors qu’il est le premier pape depuis Jean xxiii à ne pas y avoir personnellement participé. Comment alors saisir son inscription dans l’histoire des cinquante années de réception de Vatican ii ?

La lecture d’Evangelii gaudium, sa première Exhortation apostolique (24 nov. 2013), permet de comprendre comment le pontificat de François fait entrer l’Église catholique dans une nouvelle étape post-conciliaire. Document programmatique sur l’évangélisation au xxie siècle, l’Exhortation met aussi déjà en œuvre une certaine réception du Concile, implicitement ou explicitement. Par exemple, évoquant le dialogue interreligieux, et faisant référence à une déclaration des évêques de l’Inde, François manifeste une réception de Vatican ii à trois niveaux :

Une attitude d’ouverture en vérité et dans l’amour doit caractériser le dialogue avec les croyants des religions non chrétiennes, malgré les divers obstacles et les difficultés, en particulier les fondamentalismes des deux parties. Ce dialogue interreligieux est une condition nécessaire pour la paix dans le monde, et par conséquent est un devoir pour les chrétiens, comme pour les autres communautés religieuses. Ce dialogue est, en premier lieu, une conversation sur la vie humaine, ou simplement, comme le proposent les Évêques de l’Inde, une « attitude d’ouverture envers eux, partageant leurs joies et leurs peines »1.

Premièrement, François s’engage ici résolument dans le dialogue interreligieux dans la ligne de ses prédécesseurs, car il mentionne en même temps l’amour et la vérité, c’est-à-dire la juste relation avec les autres sans occulter la recherche de ce qui est vrai. Deuxièmement, il honore l’autorité propre d’une Conférence épiscopale tout en mettant en œuvre la primauté romaine, car il est le seul, comme évêque de Rome, à pouvoir donner une portée universelle à ce qui est au départ un enseignement destiné à un regroupement d’Églises particulières. Troisièmement, il reçoit le corpus conciliaire, en reprenant l’allusion des Évêques de l’Inde aux premiers mots de la Constitution pastorale Gaudium et spes2. Par ce geste, relativement subtil, François rappelle en réalité les lieux déjà effectifs d’une synodalité qui appartient à l’Église, tout en proposant de nouveaux secteurs de son effectuation comme le montrent, par exemple, les initiatives autour de la famille.

Avant d’examiner la mise en œuvre du concile Vatican ii que constitue Evangelii gaudium, nous situerons la position du pape François par rapport à ses deux prédécesseurs et à l’histoire de la réception de Vatican ii. Puis nous verrons la valorisation des lieux effectifs d’une synodalité propre au christianisme et les conditions de cette nouvelle étape qui implique l’ensemble des agents pastoraux de l’Église.

I Le pape François et l’histoire de la réception de Vatican ii

Dans sa longue interview accordée en 2013 aux revues culturelles jésuites, le pape prononça quelques phrases à propos de Vatican ii. Les seules qui firent l’objet de commentaires furent celles qui évoquaient la question liturgique, parce qu’il semblait prendre une certaine distance par rapport à des décisions de son prédécesseur. Pourtant, dépassant les querelles autour de la continuité et de la rupture, François affirme clairement ce qui lui semble essentiel à propos de Vatican ii, à savoir un geste renouvelé d’inscription de l’Évangile à l’intérieur des cultures humaines, dont la liturgie est une illustration :

Vatican ii fut une relecture de l’Évangile à la lumière de la culture contemporaine. Il a produit un mouvement de rénovation qui vient simplement de l’Évangile lui-même. Les fruits sont considérables. Il suffit de rappeler la liturgie. Le travail de la réforme liturgique fut un service du peuple en tant que relecture de l’Évangile à partir d’une situation historique concrète. Il y a certes des lignes herméneutiques de continuité ou de discontinuité, pourtant une chose est claire : la manière de lire l’Évangile en l’actualisant, qui fut propre au Concile, est absolument irréversible3.

Les lecteurs de cette interview ont été malgré tout frappés de la sobriété du pape François, en particulier sur la dialectique entre « continuité » et « discontinuité », à tel point qu’un théologien qui le connaît bien a cherché à expliquer ce relatif silence en disant que le pape préfère « rester en dehors des discussions théoriques sur le Concile4 ». Comment comprendre alors la manière dont il reçoit le concile Vatican ii par rapport à ses prédécesseurs ?

1 Une herméneutique de la réforme

La mention de la continuité et de la discontinuité renvoie sans doute aux débats autour des affirmations du Card. Ratzinger en 1984, dans un livre d’entretien publié juste avant la convocation par Jean-Paul ii du Synode extraordinaire pour le vingtième anniversaire du Concile. Contre l’idée que Vatican ii constituerait une « rupture », le préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi affirmait alors fermement la nécessité de « revenir aux textes authentiques de l’authentique Vatican ii5 ». Or, au tout début de son pontificat, dans le fameux discours à la Curie du 22 décembre 2005, le pape Benoît xvi corrige ce propos. Certes, il désavoue fermement une compréhension du concile Vatican ii comme discontinuité et rupture, au nom de laquelle on interprète les documents conciliaires en fonction d’un « esprit » qui pousse à aller au-delà des textes eux-mêmes. Mais, en face de cette herméneutique, l’interprétation qu’il propose ne se limite pas à la continuité :

D’autre part, il y a l’herméneutique de la réforme, du renouveau dans la continuité de l’unique sujet-Église, que le Seigneur nous a donné ; c’est un sujet qui grandit dans le temps et qui se développe, restant cependant toujours le même, l’unique sujet du Peuple de Dieu en marche6.

Dans la suite de ce discours, Benoît xvi cite trois lieux de cette réforme ecclésiale déjà effective : le rapport aux sciences ; le rapport aux États ; le rapport aux autres religions. Une telle approche invite non seulement à considérer Vatican ii comme un concile de réforme, mais aussi à comprendre que la réception de ce concile passe toujours par la réforme de cette même Église. En 2010, commentant l’ensemble de l’œuvre du théologien Joseph Ratzinger, le Card. Kurt Koch concluait sur le fait que cette réforme de l’Église était, aujourd’hui comme hier, un devoir spirituel essentiel :

Pour cette réforme de l’Église dans sa signification originelle de « réforme », c’est-à-dire de récupération et de restauration de la véritable forme de l’Église, je n’ai rencontré jusqu’à ce jour aucune vision meilleure que celle que le pape Benoît xvi a développée en se référant au théologien franciscain du Moyen Âge Bonaventure, qui a cherché à comprendre le chemin de la réalisation humaine et de la connaissance de Dieu à partir de la parabole du sculpteur (…). Alors la véritable réforme de l’Église ne peut se réaliser que dans la dynamique de l’ablatio, afin que sa forma nobilis, la forme du corps du Christ, puisse se rendre à nouveau visible7.

En explicitant l’herméneutique de la continuité dans la réforme, le pape Benoît xvi avait engagé son pontificat en se situant par rapport à Jean-Paul ii, non seulement en lui rendant hommage, mais surtout en rappelant à quel point ce dernier s’était engagé dans la réception conciliaire. Au lendemain de son élection en avril 2005, le nouveau pape plaçait d’ailleurs son pontificat à l’intérieur de la réception de Vatican ii, en reprenant une expression qui caractérise une certaine herméneutique conciliaire : « Le Pape Jean-Paul ii a indiqué à juste titre le Concile comme la “boussole” qui permet de s’orienter dans le vaste océan du troisième millénaire8. »

2 Le concile Vatican ii comme « boussole »

C’est au moment du grand Jubilé de l’an 2000 que Jean-Paul ii emploie cette image, en insistant sur l’importance de prendre en compte l’ensemble du Concile, et pas uniquement un document ou un aspect particulier :

À mesure que passent les années, ces textes (du concile Vatican ii) ne perdent rien de leur valeur ni de leur éclat. Il est nécessaire qu’ils soient lus de manière appropriée, qu’ils soient connus et assimilés, comme des textes qualifiés et normatifs du Magistère, à l’intérieur de la Tradition de l’Église. Alors que le Jubilé est achevé, je sens plus que jamais le devoir d’indiquer le Concile comme la grande grâce dont l’Église a bénéficié au vingtième siècle : il nous offre une boussole fiable pour nous orienter sur le chemin du siècle qui commence9.

La mention de l’orientation de l’Église, à partir d’une juste lecture des documents conciliaires, montre qu’il ne faut pas considérer Vatican ii comme un ensemble de normes à appliquer, mais comme un corpus à interpréter, ce qui était déjà explicite dans les critères élaborés lors du Synode extraordinaire de 1985, vingt ans après la clôture du Concile. Même s’il est nécessaire, pour toute lecture sérieuse d’un document conciliaire, de le situer dans l’histoire du concile, même s’il faut aussi tenir compte du processus parfois complexe de rédaction du texte qui a été voté et promulgué et qui, seul, fait autorité, l’acte de réception n’est pas réductible à l’application d’un texte, ou d’un fragment de texte.

En parlant de « boussole », le pape Jean-Paul ii explicitait la prise de conscience que c’est le concile Vatican ii qu’il faut recevoir, et pas uniquement des textes, ce qui renvoie à l’expérience vécue par les Pères conciliaires, mais aussi à celle vécue par les observateurs, les experts et les journalistes. Dans une grande introduction à la publication de l’ensemble des documents conciliaires, Christoph Theobald déploie la puissance heuristique de l’analogie de la boussole.

Loin de se réduire à une simple « application », objet d’un projet maîtrisable par une stratégie, qui n’est pas une simple application, à l’intérieur d’un « projet » relevant d’une stratégie maîtrisée, celle-ci suppose un changement d’ordre, une transformation des institutions (réforme) et des mentalités (rénovation), qui conduit à « réinventer » l’expérience même du concile à l’intérieur d’un espace plus réduit et culturellement plus situé, pour permettre une adhésion intérieure au corpus, qui suppose l’expérience propre des sujets récepteurs10.

L’acte de réception du concile Vatican ii, compris comme « boussole » pour l’Église, ne peut donc se limiter au déchiffrage d’un texte. Recevoir Vatican ii renvoie alors aux éléments perçus comme essentiels dans l’expérience conciliaire, à commencer par l’écoute de la Parole de Dieu à l’intérieur d’un contexte perçu comme nouveau par les pères conciliaires, en vue d’exprimer pour aujourd’hui le contenu de la foi chrétienne.

3 Corpus, histoire et expérience

En cela, la célébration du cinquantième anniversaire de Vatican ii ces dernières années n’est pas d’abord un regard nostalgique en arrière : elle montre surtout que nous avons accès au Concile à travers ces cinquante années de réception qui ont permis à l’Église tout entière de franchir des seuils dans l’acte de réception. Loin de se limiter au commentaire des documents, ou des extraits de ceux-ci, la juste réception du Concile implique aujourd’hui la prise en compte de son histoire et, plus encore, de l’expérience unique qu’il a constituée, en vue d’une mise en œuvre à l’intérieur d’un contexte sans cesse renouvelé.

C’est pourquoi, en affirmant, dans son interview avec A. Spadaro, que le concile Vatican ii est une « relecture de l’Évangile à partir d’une situation historique concrète », François s’inscrit clairement dans l’histoire de la réception conciliaire, à la suite de Jean-Paul ii et de Benoît xvi. Il s’agit alors de recevoir Vatican ii dans un acte de réforme de l’Église, comme le commente Victor Manuel Fernandez, pour qui le pape actuel « applique le Concile dans sa totalité, sans pause et sans marche arrière, avec l’intention d’engager l’Église dans une voie qui la fasse “sortir” d’elle-même, afin qu’elle puisse rejoindre tout le monde11 ». Cet acte de réception du concile Vatican ii apparaît de manière évidente dans Evangelii gaudium.

À la différence des propos rapportés par des journalistes, la parole pontificale est autorisée et nous pouvons l’interpréter en nous appuyant sur son texte même et sur les références qui fondent cet enseignement. En découvrant comment dans cette exhortation apostolique le pape François reçoit le concile Vatican ii, nous percevrons non seulement le seuil qu’il fait franchir à l’Église mais encore comment notre propre responsabilité y est engagée.

II Evangelii gaudium, seuil dans la réception de Vatican ii

Comprendre à quel point Evangelii gaudium constitue un acte de réception de Vatican ii par le pape François revient à être attentif à la manière dont celui-ci se réfère au Concile, en le recevant comme boussole et exigence de réformes pour l’Église, à la suite de Jean-Paul ii et de Benoît xvi. Or, les références au Concile, ou à sa réception toujours en cours, ne se limitent pas aux citations explicites des textes du corpus conciliaire : il y a bien d’autres liens plus implicites, qui tiennent sans doute à son expérience pastorale en Argentine, en particulier comme évêque, membre du celam (Conseil épiscopal latino-américain), où il joua un rôle essentiel dans la rédaction du document d’Aparecida (2007).

1 Une interprétation enracinée dans une expérience pastorale

Cette expérience épiscopale, en particulier l’exigence pastorale de connaître le peuple dont on a la charge et d’être connu de lui, se retrouve dans l’insistance sur l’image de l’Église comme peuple de Dieu dans Evangelii gaudium. La prégnance de la dimension ecclésiale du dessein de Dieu conduit le pape à insister sur la vocation de l’Église à l’universel, au risque de durcir ce que formule Vatican ii en Lumen gentium 9, auquel l’Exhortation se réfère.

Ce salut, que Dieu réalise et que l’Église annonce joyeusement, est destiné à tous, et Dieu a donné naissance à un chemin pour s’unir chacun des êtres humains de tous les temps. Il a choisi de les convoquer comme peuple et non pas comme des êtres isolés. (…) Ce peuple que Dieu s’est choisi et a convoqué est l’Église12.

Evangelii gaudium témoigne de l’option choisie par François dans la manière de comprendre l’Église, car l’analogie biblique de « peuple de Dieu » est largement privilégiée par rapport à d’autres analogies tout aussi prestigieuses, en particulier celle de « corps du Christ ». Si l’expérience de celui qui fut pasteur propre d’une Église diocésaine joue sans doute dans ce choix13, cela indique surtout une grande sensibilité à l’histoire, et à l’inscription de l’Église dans l’histoire des hommes.

Cette importance de l’histoire dans Evangelii gaudium se manifeste par la place qu’y occupe Gaudium et spes. Il y a, entre la Constitution pastorale et l’Exhortation apostolique, un rapprochement frappant non seulement dans les titres, mais aussi dans l’adresse même des deux documents avec la mention de l’expression caractéristique du « monde d’aujourd’hui14 ». Même si cette expression semble redondante, elle signifie que le pape François, comme les Pères conciliaires, veut consciemment se situer à l’intérieur des processus historiques, en prenant en compte l’activité des humains. Le « monde » n’est donc pas une essence qui existerait indépendamment de toute histoire, mais il est à comprendre avant tout comme un espace où se déploie la liberté de l’homme dans le temps de l’histoire. C’est d’ailleurs la métaphore de l’espace structuré par une chronologie que Gaudium et spes choisit, en comparant le monde à un « théâtre15 ». C’est pourquoi cette prise en compte du « monde d’aujourd’hui » n’est pas seulement une approche sociologique, ou politique, ou historique, c’est d’abord une confession de foi. Le christianisme affirme que le monde, marqué par le péché, est conservé dans l’amour de Dieu, ce qui nous pousse à inscrire sans cesse la nouveauté chrétienne à l’intérieur même de l’histoire et des cultures.

2 La nouveauté chrétienne et les cultures du monde

En effet, affirmer que l’Église est dans « le monde de ce temps » revient à reconnaître que le christianisme entre toujours en interaction avec les éléments de cette condition historique de l’homme. Cette volonté explicite et consciente de se placer à l’intérieur même de l’histoire de l’humanité évite de laisser croire que l’Église constitue une alternative intégrale, en face d’une société contaminée par le péché. Cela est souligné par Evangelii gaudium quand François cherche à traiter la question des rapports entre la foi chrétienne et les cultures humaines. Par « culture », il entend tout à la fois les élaborations savantes et les pratiques populaires. En effet, le pape salue le rôle des théologiens dans leurs efforts de dialogue avec les savants16, mais il invite aussi à honorer la « piété populaire », c’est-à-dire les manifestations les plus larges de la foi chrétienne à l’intérieur de la diversité des cultures populaires17. Loin d’un universalisme abstrait, Evangelii gaudium encourage cette interaction entre la foi chrétienne et l’immense diversité des cultures humaines en se fondant sur l’anthropologie théologale de Gaudium et spes tout en dépassant la littéralité du texte de la Constitution pastorale, comme le montre cette modification d’un adage reçu de la tradition théologique : « La grâce suppose la culture, et le don de Dieu s’incarne dans la culture de la personne qui la reçoit18. » La diversité des cultures humaines est ainsi valorisée jusqu’à reconnaître à celles-ci une certaine autonomie19.

C’est dans ce contexte que peut se comprendre l’appel à la « décentralisation20 », qui ne vise pas uniquement les processus administratifs propres à l’Église, mais qui va jusqu’à une interrogation sur le statut accordé aux Conférences épiscopales. En réalité, dans ce domaine, c’est par rapport à l’histoire de la réception du concile Vatican ii que le pape François se situe, de manière tout à fait explicite à propos de la primauté romaine, quand il souligne que, depuis Jean-Paul ii et son appel à renouveler la forme d’exercice de la primauté romaine, « nous avons peu avancé en ce sens21 ». En cela, Evangelii gaudium constitue un vrai programme pour le pontificat, comme François l’explicite à plusieurs reprises22. Mais cette volonté de réforme n’est pas seulement programmatique, elle est aussi effectivement mise en œuvre, en particulier dans le rôle réel reconnu aux Conférences épiscopales.

3 La place des Conférences épiscopales

En effet, dans le numéro consacré à la conversion pastorale de la papauté, le pape rappelle l’importance que le Concile accorde aux conférences épiscopales, tout en soulignant les progrès à faire :

Mais ce souhait (de Vatican ii) ne s’est pas pleinement réalisé, parce que n’a pas encore été suffisamment explicité un statut des Conférences épiscopales qui les conçoive comme sujet d’attributions concrètes, y compris une certaine autorité doctrinale authentique. Une excessive centralisation, au lieu d’aider, complique la vie de l’Église et sa dynamique missionnaire23.

De manière spectaculaire, François donne explicitement en référence la Lettre apostolique en forme de « Motu proprio » de Jean-Paul ii Apostolos Suos (1998) qui a pourtant limité les prérogatives des Conférences épiscopales en matière d’enseignement authentique24. En réalité, l’évolution de la place des Conférences épiscopales n’est pas renvoyée à de futures réformes car, de manière inédite, une véritable autorité leur est reconnue, comme le montre la multiplication des citations, tirées des travaux du celam mais aussi de Conférences épiscopales de tous les continents (Inde, États-Unis d’Amérique, Brésil, Philippines, Congo). Les citations de nombreux documents publiés par Jean-Paul ii et Benoît xvi après un synode d’évêques montrent aussi l’importance que François accorde au fruit du travail entre évêques. Ainsi, les évêques de France sont cités à deux reprises, et l’une des citations dispose d’une formulation qui, dans ce contexte, est particulièrement frappante, puisque le pape s’appuie sur ce que les évêques français « enseignent25 », reconnaissant ainsi qu’ils disposent déjà d’une certaine « autorité doctrinale authentique ». Ce n’est donc pas la citation paradoxale d’Apostolos suos qui constitue l’illustration majeure de cette nouvelle étape de la réception de Vatican ii, mais surtout la pratique pontificale qui, subtilement, met en œuvre une certaine forme de « décentralisation », non sans l’affirmation claire de la primauté romaine.

Il faut donc considérer Evangelii gaudium non seulement comme un programme de réformes pour le pontificat de François, déjà mises en œuvre à l’intérieur de l’Exhortation, mais surtout comme un acte de réception du concile Vatican ii. Cette manière de recevoir Vatican ii, enracinée dans l’expérience pastorale du pape, est caractérisée par une certaine mise en œuvre de la synodalité propre au christianisme. Car c’est bien l’Église comme telle, comme peuple de Dieu dans l’histoire des hommes, qui est en mesure d’inscrire la foi chrétienne dans la diversité des cultures humaines. Naturellement, Evangelii gaudium montre à quel point cette Église est structurée par le ministère épiscopal, avec la primauté romaine, mais appelle aussi à la participation de tous. En cela, il y a bien un seuil franchi dans la réception conciliaire avec cet appel renouvelé à des formes variées de synodalité, impliquant tous les acteurs de la vie de l’Église, les évêques et leurs collaborateurs tout autant que l’ensemble des fidèles, ce qui invite à mesurer l’originalité de cette synodalité.

III La synodalité comme expérience de la foi chrétienne

C’est en effet cette opération de réception du concile Vatican ii par François dans Evangelii gaudium qui permet de mieux comprendre la nature de l’expérience synodale dans la foi chrétienne, en approfondissant les moyens propres dont elle dispose déjà ainsi qu’en trouvant sans doute d’autres modalités de mise en œuvre. Mais c’est bien à l’intérieur de la finalité missionnaire de l’Église qu’il faut situer cette synodalité, car l’Exhortation apostolique veut encourager tous les chrétiens à une écoute renouvelée de la Parole de Dieu à l’intérieur des cultures du monde, pour être en mesure de « sortir » en missionnaires de l’Évangile.

1 Les instruments de la nouvelle étape de la réception

Non seulement la manière dont le pape s’appuie sur les travaux de groupes d’évêques montre une mise en œuvre effective de la « décentralisation », mais François en appelle à l’expérience des Églises orthodoxes pour montrer où se situent les lieux possibles d’apprentissage pour l’Église catholique26. En s’appuyant implicitement sur une remarque importante de Jean-Paul ii, Evangelii gaudium ouvre un espace d’enrichissement à propos de la synodalité et de la collégialité épiscopale.

Mais, ici non plus, l’Exhortation apostolique n’est pas seulement programmatique, car François rappelle clairement les instruments dont l’Église catholique bénéficie déjà et invite à les mettre davantage en œuvre, à tous les niveaux de réalisation de l’Église. À cet effet, le pape rappelle plusieurs canons du Code de droit canonique, non pour annoncer des changements, mais pour encourager vivement les évêques et leurs collaborateurs :

Dans sa mission de favoriser une communion dynamique, ouverte et missionnaire, il [l’évêque] devra stimuler et rechercher la maturation des organismes de participation proposés par le Code de droit Canonique et d’autres formes de dialogue pastoral, avec le désir d’écouter tout le monde, et non pas seulement quelques-uns, toujours prompts à lui faire des compliments. Mais l’objectif de ces processus participatifs ne sera pas principalement l’organisation ecclésiale, mais le rêve missionnaire d’arriver à tous27.

Les canons explicitement cités par François sont tirés des normes concernant les Églises particulières et leurs autorités. Il est évidemment essentiel d’examiner de près les canons retenus et ceux qui sont laissés de côté, aussi bien au niveau diocésain28 qu’au niveau paroissial29. Dans les deux cas, ce sont les lieux de « conseil » qui sont valorisés, l’évêque avec ses prêtres, ou leurs représentants, mais aussi le curé avec certains de ses paroissiens. Ces « organismes de participation » existent déjà, et l’approfondissement de leur mise en œuvre peut sans doute faire partie du processus résolu de « conversion missionnaire » !

Par cette mention des normes canoniques, le pape montre que l’appel en faveur de la conversion missionnaire qu’il lance tant aux Églises particulières qu’aux paroisses30 peut déjà s’appuyer sur des pratiques synodales qu’il s’agit d’encourager et de faciliter. Pour autant, ce ne sont pas des réformes de structure qu’envisage d’abord François, mais l’engagement renouvelé des chrétiens dans la mission de l’Église, ce qui passe par une expérience personnelle de la joie de l’Évangile dont l’un des moyens privilégiés est constitué par l’écoute de la Parole de Dieu.

2 L’inscription de la foi dans l’existence par la Parole

En effet, l’appel à la participation à la mission de l’Église, adressé avec force à tous les chrétiens, s’enracine dans l’expérience effective de la foi comme rencontre d’une personne. Dans les tout premiers mots de l’Exhortation, le pape lance cette invitation qui en constitue comme le socle le plus profond :

J’invite chaque chrétien, en quelque lieu et situation où il se trouve, à renouveler aujourd’hui même sa rencontre personnelle avec Jésus Christ ou, au moins, à prendre la décision de se laisser rencontrer par lui, de le chercher chaque jour sans cesse31.

Ici, de manière principielle, se manifeste avec force la dimension personnelle de la nouvelle étape de la réception du concile Vatican ii à laquelle le pape François appelle l’Église. S’il est bien question de réformer l’Église, si bien des moyens sont rappelés d’abord, proposés à nouveaux frais, voire renouvelés dans certains cas, c’est avant tout l’inscription de la foi à l’intérieur de la vie des chrétiens qui constitue l’élément décisif et irremplaçable.

Si l’on trouve dans l’Exhortation apostolique le rappel des moyens traditionnels de la vie chrétienne, l’écoute de la Parole, la vie sacramentelle et le souci des autres et, en particulier, des pauvres, il y a une insistance particulière sur le premier de ces moyens, non seulement par la place qu’occupe la question délicate de l’homélie dans Evangelii gaudium, mais plus encore par la reconnaissance de ce qui unit l’Église et Israël, au-delà de la rupture qu’implique la confession de la Seigneurie du Christ. Les trois paragraphes qui sont consacrés aux relations avec le judaïsme (EG 247 à 249) sont particulièrement denses et mériteraient à eux seuls un déploiement complet. Ici encore, le pape s’inscrit dans la réception du concile Vatican ii, même s’il ne cite jamais Nostra Aetate 4, dont on connaît pourtant l’importance décisive au Concile, non seulement par le parcours complexe de ce document avant son vote et sa promulgation, mais aussi par la nature des effets qu’il a eus depuis cinquante ans, dans de nombreux domaines de la vie de l’Église.

Ici, François va plus loin et propose une formule qui sera sans doute beaucoup commentée. En effet, sans omettre de confesser la permanence de l’Alliance dont bénéficie le peuple d’Israël, il affirme la fécondité de celle-ci pour le judaïsme d’aujourd’hui, avant de reconnaître que l’Église peut donc en bénéficier :

Dieu continue à œuvrer dans le peuple de la première Alliance et fait naître des trésors de sagesse qui jaillissent de sa rencontre avec la Parole divine. Pour cela, l’Église aussi s’enrichit lorsqu’elle recueille les valeurs du Judaïsme. Même si certaines convictions chrétiennes sont inacceptables pour le Judaïsme, et l’Église ne peut pas cesser d’annoncer Jésus comme Seigneur et Messie, il existe une riche complémentarité qui nous permet de lire ensemble les textes de la Bible hébraïque et de nous aider mutuellement à approfondir les richesses de la Parole, de même qu’à partager beaucoup de convictions éthiques ainsi que la commune préoccupation pour la justice et le développement des peuples32.

Dans la reconnaissance de la complémentarité et de la collaboration possible entre l’Église et le peuple d’Israël, le pape François prolonge largement les affirmations de la Commission biblique pontificale (2001), placée alors sous la responsabilité du Card. Ratzinger33, en dépassant en outre la seule question de l’herméneutique biblique par l’articulation avec la question politique dont chacun voit la pertinence actuelle, en particulier au Proche-Orient.

Ici encore, par le rappel de ce qui est commun aux Juifs et aux chrétiens, François ne veut pas seulement s’inscrire dans la réception de Vatican ii34, il veut manifester que l’Église dispose elle aussi du moyen de « faire naître des trésors de sagesse », par la rencontre avec une Parole vivante ! La conviction du pape constitue une invitation lancée à tous les chrétiens, et pas aux seuls ministres ordonnés :

La parole a en soi un potentiel que nous ne pouvons pas prévoir. L’Évangile parle d’une semence qui, une fois semée, croît d’elle-même, y compris quand l’agriculteur dort (cf. Mc 4,26-29). L’Église doit accepter cette liberté insaisissable de la Parole, qui est efficace à sa manière, et sous des formes très diverses, telles qu’en nous échappant elle dépasse souvent nos prévisions et bouleverse nos schémas35.

L’ampleur de l’opération de réception de Vatican ii dans Evangelii gaudium, dont une partie seulement a été ici explicitée, indique clairement que le pape François entend mettre l’Église en état de « sortie missionnaire » tout en mobilisant des moyens dont l’essentiel est déjà disponible : une écoute féconde de la Parole de Dieu, à l’intérieur d’une culture, par un « peuple » que cette Parole rassemble et structure. Ce rappel, inscrit dans la manière même dont Evangelii gaudium s’appuie sur le concile Vatican ii, n’est pas sans impact sur l’activité théologique elle-même.

3 Une synodalité dans l’activité théologique

En effet, d’une manière qui est apparue rafraîchissante à beaucoup d’observateurs, Evangelii gaudium souligne l’activité des théologiens, non seulement en saluant l’apport des femmes à la théologie36, mais en rappelant surtout que la réflexion théologique n’a de sens qu’à l’intérieur de la mission de l’Église :

Engagée dans l’évangélisation, l’Église apprécie et encourage le charisme des théologiens et leur effort dans la recherche théologique qui promeut le dialogue avec le monde de la culture et de la science. Je fais appel aux théologiens afin qu’ils accomplissent ce service comme faisant partie de la mission salvifique de l’Église. Mais il est nécessaire qu’à cette fin, ils aient à cœur la finalité évangélisatrice de l’Église et de la théologie elle-même, et qu’ils ne se contentent pas d’une théologie de bureau37.

Nul doute alors que le programme de « discernement, de purification et de réforme » peut aussi s’appliquer à la théologie, par le rappel sous-jacent de quelques critères de scientificité. Inscrite à l’intérieur de la mission de l’Église, la théologie s’appuie avant tout sur la Parole de Dieu et implique la confession de la foi chrétienne. Elle peut participer, avec ses règles propres, à cette synodalité qui est essentielle au christianisme, en éclairant sans doute, mais surtout en s’inscrivant dans cette nouvelle étape de la réception du concile Vatican ii à laquelle l’Église est invitée.

Ce n’est pas uniquement par un effet de génération que l’Église entre dans une nouvelle étape de la réception du concile Vatican ii, même si le paramètre personnel joue particulièrement, comme le montre Evangelii gaudium : le christianisme est d’abord une expérience qui, ultimement, demande l’engagement de chaque baptisé dans la confession de la foi. En proposant Evangelii gaudium, le pape ne crée pas ex nihilo une manière radicalement nouvelle de se référer à Vatican ii. La compréhension du Concile comme relecture de l’Évangile dans la situation contemporaine vient de l’expérience conciliaire, et Jean-Paul ii l’a explicitée en désignant Vatican ii comme « boussole » de l’Église pour le siècle qui commence à peine. Le programme de réforme de l’Église remonte au Concile lui-même, tandis que Benoît xvi lui a donné un relief particulier. En revanche, en se situant à distance des problèmes « théoriques » concernant l’herméneutique conciliaire, mais en proposant une appropriation personnelle de Vatican ii, François aide l’Église à franchir une étape, qui ne sera effective que par notre participation à cette synodalité qui pourrait désormais se déployer à nouveaux frais.

Cette synodalité, propre à la foi chrétienne en ce qu’elle n’est pas réductible aux processus politiques contemporains, qu’elle a partiellement inspirés et dont elle pourrait à son tour s’inspirer, bénéficie déjà de moyens éprouvés dans les pratiques catholiques depuis des siècles. Mais, d’une manière renouvelée, Vatican ii a constitué une expérience effective de la puissance d’une Parole, écoutée à l’intérieur du Collège épiscopal, sous l’autorité de l’évêque de Rome, non sans la collaboration de nombreux prêtres mais aussi d’observateurs non catholiques, de journalistes, de laïcs, en vue de son inscription dans les processus historiques pris au sérieux.

Ce qu’a permis l’historicisation, finalement récente, de Vatican ii, c’est de comprendre que la réception aujourd’hui de ce Concile passe par l’interprétation du corpus, à l’intérieur d’une expérience chrétienne analogue à celle que les Pères conciliaires ont vécue. Dans l’histoire de la réception, le seuil franchi par Evangelii gaudium montre la fécondité d’une écoute de la Parole de Dieu, en Église, à l’intérieur des cultures du monde. Ceci nous concerne tous, aujourd’hui avec les questions essentielles et délicates concernant la famille et demain, peut-être, avec les questions aussi essentielles et aussi délicates que posent les ministères dans l’Église.

Notes de bas de page

  • 1 Evangelii gaudium (EG) 250. Le pape François cite ici la Conférence des évêques de l’Inde, Déclaration finale de la 30e Assemblée générale le 8 mars 2012, The Church’s Role for a Better India.

  • 2 Cf. GS 1 : « Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur. »

  • 3 Pape François, L’Église que j’espère. Entretiens avec le p. Spadaro, s.j., Paris, Flammarion - Études, 2013, p. 78.

  • 4 M. Fernandez, Ce que nous dit François. Entretiens avec Paolo Rodari, trad. B. Courteille, Ivry-sur-Seine, Éd. de l’Atelier, 2014, p. 27 (éd. originale : Il progetto di Francesco. Dove vuole portare la Chiesa, Bologna, EMI, 2014).

  • 5 J. Ratzinger, Entretien sur la foi, avec Vittorio Messori, Paris, Fayard, 1985, p. 31-32.

  • 6 Benoît xvi, « Réflexions sur une année de la vie de l’Église et du monde. Discours à la Curie », 22 déc. 2005, Doc. cath. 103 (2006), p. 59.

  • 7 Card. K. Koch, dans Benoît xvi, Le cercle des étudiants, Card. K. Koch, Le concile Vatican ii. L’herméneutique de la réforme, Paris, Parole et Silence, 2014, p. 73-74.

  • 8 Benoît xvi, « Premier message au terme de la concélébration eucharistique avec les cardinaux électeurs dans la chapelle sixtine », 20 avr. 2005, Doc. cath. 102 (2005), p. 539.

  • 9 Jean-Paul ii, Novo millennio ineunte (6 jan. 2001) 57, Doc. cath. 98 (2001), p. 88. C’est l’auteur qui souligne, dans l’original latin (Acta Apostolicae Sedis 93, 2001, p. 308).

  • 10 C. Theobald, « Introduction », dans Vatican ii. L’intégralité, Paris, Bayard, 2002, p. xxvii. C’est l’auteur qui souligne.

  • 11 V. M. Fernandez, Ce que nous dit François (cité n. 4), p. 27-28.

  • 12 EG 113. Cette dernière phrase semble remettre en cause l’existence contemporaine d’Israël comme peuple toujours choisi par Dieu, ce que Vatican ii évite soigneusement. En réalité, comme le montre EG 247-249, François s’engage nettement, à la suite de ses prédécesseurs, en faveur du dialogue et de l’amitié avec le peuple d’Israël.

  • 13 Pour qualifier le ministère épiscopal, le pape fait régulièrement jouer l’analogie du pasteur, comme le montre EG 31.

  • 14 Gaudium et spes est la « Constitution pastorale sur l’Église dans le monde de ce temps ». Evangelii gaudium est une « Exhortation apostolique du Saint-Père François, aux évêques, aux prêtres et aux diacres, aux personnes consacrées, et à tous les fidèles laïcs sur l’annonce de l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui ».

  • 15 « Le monde qu’il [le Concile] a ainsi en vue est celui des hommes, la famille humaine tout entière avec l’univers au sein duquel elle vit. C’est le théâtre où se joue l’histoire du genre humain, le monde marqué par l’effort de l’homme, ses défaites et ses victoires » (GS 2).

  • 16 Le service de la théologie fait partie de « la mission salvifique de l’Église » (EG 133).

  • 17 EG 68.

  • 18 EG 115. En s’appuyant sur GS 25 et 53, François affirme que l’homme est toujours « un être culturellement situé ».

  • 19 Le pape cite GS 36, consacré à la « juste autonomie des réalités terrestres » quand il souligne la diversité des peuples humains à l’intérieur du peuple de Dieu : « Chaque peuple, dans son évolution historique, promeut sa propre culture avec une autonomie légitime » (EG 115).

  • 20 En EG 16, François affirme qu’il sent « la nécessité de progresser dans une “décentralisation” salutaire ».

  • 21 Ce constat du pape en EG 32 suit la citation de l’encyclique Ut Unum Sint 95 de Jean-Paul ii (1995), qu’il reprend ainsi à son compte en parlant de « conversion de la papauté ».

  • 22 Dès EG 1, François explique qu’il désire « indiquer des voies pour la marche de l’Église dans les prochaines années ». À plusieurs reprises, des indications très précises sont données dans lesquelles le pape engage l’autorité que l’Église lui reconnaît, en particulier dans l’exhortation lancée à toutes les Églises locales « à entrer dans un processus résolu de discernement, de purification et de réforme » (EG 30).

  • 23 EG 32.

  • 24 Jan Grootaers rapporte comment la volonté du Synode extraordinaire de 1985 de clarifier théologiquement le statut des Conférences épiscopales a finalement conduit à cette Lettre apostolique. À ses yeux, Apostolos suos manifeste la « méfiance curiale » devant l’activité considérable de nombreux regroupements d’évêques depuis le concile Vatican ii (cf. J. Grootaers, « La collégialité à l’épreuve du Synode extraordinaire de 1985 et les retombées de celui-ci », dans Heurs et malheurs de la « collégialité ». Pontificats et synodes face à la réception de Vatican ii, Leuven, Peeters, 2012, p. 182s).

  • 25 Cf. EG 66. À propos du mariage, le pape François cite ce que les évêques français du Conseil Famille et Société déclarent dans une note du 28 sep. 2012 (Élargir le mariage aux personnes de même sexe ? Ouvrons le débat !), en reprenant à son compte cet « enseignement ».

  • 26 EG 246 : « Simplement, pour donner un exemple, dans le dialogue avec les frères orthodoxes, nous les catholiques, nous avons la possibilité d’apprendre quelque chose de plus sur le sens de la collégialité épiscopale et sur l’expérience de la synodalité. À travers un échange de dons, l’Esprit peut nous conduire toujours plus à la vérité et au bien. » Même s’il n’est pas explicitement cité par François, nous retrouvons ce que Jean-Paul ii affirmait en Ut Unum Sint 14, soulignant que la plénitude dont jouit l’Église catholique ne l’empêche pas de pouvoir bénéficier de ce qui est vécu par les autres Églises et communautés ecclésiales « où certains aspects du mystère chrétien ont parfois été mieux mis en lumière ».

  • 27 EG 31.

  • 28 Les cc. 460 à 468 cités en EG 31 concernent le synode diocésain, dont on voit bien la pertinence pour mettre en œuvre la synodalité de l’Église, même s’ils n’en sont pas les seuls instruments, puisque sont mentionnés aussi les cc. 511 à 514, c’est-à-dire le conseil pastoral diocésain. En notant les cc. 492 à 502, François retient, de la curie diocésaine, le conseil économique, le conseil presbytéral et le collège des consulteurs, tandis qu’il laisse de côté ce qui concerne le Vicaire général ou les chanoines.

  • 29 De tout ce qui concerne les paroisses, le pape ne retient en EG 31 que les cc. 536-537, c’est-à-dire le conseil pastoral paroissial et le conseil pour les affaires économiques.

  • 30 « Pour que cette impulsion missionnaire soit toujours plus intense, généreuse et féconde, j’exhorte aussi chaque Église particulière à entrer dans un processus résolu de discernement, de purification et de réforme » (EG 30).

  • 31 EG 3.

  • 32 EG 249.

  • 33 « Sur le plan concret de l’exégèse, les chrétiens peuvent, néanmoins, apprendre beaucoup de l’exégèse juive pratiquée depuis plus de deux mille ans et, de fait, ils ont appris beaucoup au cours de l’histoire. De leur côté, ils peuvent espérer que les Juifs pourront tirer profit, eux aussi, des recherches exégétiques chrétiennes » (Commission biblique pontificale, Le peuple juif et ses saintes Écritures dans la Bible chrétienne, Paris, Cerf, 2001, p. 55-56).

  • 34 Il est toujours difficile d’interpréter un silence, mais l’absence totale de mention de la déclaration Nostra Aetate en EG, aussi bien ici que dans les numéros consacrés à l’islam, où il y a un renvoi à LG 6, peut sans doute être comprise comme la reconnaissance que la déclaration conciliaire est devenue un bien commun de l’Église, au point que le rappel n’est pas nécessaire, contrairement à d’autres éléments conciliaires dont la réception n’est pas achevée ! Il faut quand même préciser que l’expression « nostra aetate » apparaît dans le titre en latin du texte officiel d’Evangelii gaudium, publié en italien (Acta Apostolicae Sedis 105, 2013, p. 1019).

  • 35 EG 22.

  • 36 EG 103.

  • 37 EG 133.

newsletter


la revue


La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

contact


Nouvelle revue théologique
Boulevard Saint-Michel, 24
1040 Bruxelles, Belgique
Tél. +32 (0)2 739 34 80