Dans le titre de ce court traité qu'il adresse à ses fratres
dilectissimi (est-ce une lettre, un sermon?), Cyprien utilise,
dans le sens de jalousie, un mot d'origine grecque, zelum, qui,
dans le reste de son oeuvre a toujours une connotation positive;
pour désigner l'envie, il emploie un mot imagé, livor, qui
a cours surtout en poésie, et qui évoque un 'bleu' ecchymotique. La
composition de l'ouvrage ne peut être antérieure à 251, date du
schisme de Felicissimus auquel le texte fait une allusion anonyme:
«on refuse de supporter un autre à la tête de la communauté». La
langue est classique, la construction également. Entre l'exorde (le
diable est aux aguets) et la conclusion (vaincre le diable et
gagner le ciel), une section psychologique est encadrée par deux
sections bibliques: la première, illustrant la nocivité de la
jalousie dans l'AT (Satan, Caïn, Saül, les frères de Joseph); la
seconde, invitant le lecteur à combattre la jalousie au nom du
grand commandement de l'amour du N.T.. Dans ses considérations
moralistes, Cyprien explique que, alors que tout acte délictueux
(d'un adultère, d'un meurtrier, d'un voleur, d'un faussaire…) prend
fin avec la consommation du délit, la jalousie, quant à elle, est
un malheur sans fin: l'ennemi est toujours dans ton coeur; tes
écorchures, secrètes, t'accablent plus qu'une blessure physique. La
traduction, excellente, est de la main de M. Poirier à qui sont
dues également l'introduction et les notes. - P.Detienne sj