Do not follow this hidden link or you will be blocked from this website !

Il senso letterale degli Esercizi di S. Ignazio e la sua attualità
Pierre Gervais, Les quatre semaines des Exercices spirituels d'Ignace de Loyola (2017)

Jean-Marie Hennaux s.j.
Bisogna innanzitutto mettere in luce il carattere originale del libro di Pierre Gervais rispetto alla letteratura immensa che concerne gli Esercizi spirituali di Ignazio di Loyola. In realtà, non si tratta di un loro commento. (…)

À propos de

P. Gervais s.j., Les quatre semaines des Exercices spirituels d’Ignace de Loyola, préf. J.-M. Hennaux, coll. IET 26, Namur, Lessius, 2017, 15x22, 208 p., 19 €. ISBN 978-2-87299-329-1.

Il faut d’emblée mettre en lumière le caractère original du présent livre en regard de la littérature immense concernant les Exercices spirituels d’Ignace de Loyola. Il ne s’agit pas, à proprement parler, d’un commentaire des Exercices. L’auteur le dit clairement dès le début : « Ce travail n’est pas un commentaire des Exercices. » Le texte est « à lui-même son propre interprète ». Il se commente lui-même. Il répond lui-même aux questions qu’il pose. Il ne faut rien lui ajouter. Il suffit de le lire avec attention et de le laisser s’exposer et s’expliquer lui-même. Pierre Gervais définit son œuvre comme étant « davantage un exercice de lecture qu’un commentaire du texte des Exercices ».

Écoutons-le dès les premières lignes de son Avant-Propos :

Ce livre est né d’une conviction qui ne s’est pas démentie tout au long de sa rédaction, à savoir : même là où il résiste, le texte des Exercices ne se trompe pas, et ce n’est qu’en lui faisant confiance que les questions qu’il soulève trouvent en lui leurs solutions.

Ignace de Loyola a donné des définitions précises de tous les mots-clés qu’il utilise dans ses Exercices. Inutile donc, pense le père Gervais, de gloser autour d’eux. Ils se renvoient les uns aux autres et s’éclairent les uns par les autres. Ne sortons pas du glossaire qui nous a été fourni. Tenons-nous plutôt en « la clôture des signes du livre lui-même », livre qui fut conçu comme un tout.

Les seules références extérieures que s’autorise l’auteur sont celles de Martin Luther et de Jean de la Croix. Références en quelque sorte imposées par le texte. À propos de l’expérience de la contrition dans la première semaine des Exercices pour le premier, et, pour le second, de l’expérience de la consolation en deuxième semaine.

Étant donné le point de vue singulier ci-dessus exposé, le lecteur ne s’étonnera pas de ne trouver dans ce livre aucune référence aux commentaires existants des Exercices spirituels. Ces références auraient distrait le lecteur de l’exégèse que le texte des Exercices donne de lui-même. C’est sur celle-ci que notre attention est invitée à se concentrer exclusivement.

Dans une communication orale à ses frères jésuites, le père Gervais affirmait, évoquant implicitement les commentaires des Exercices : « J’ai toujours été un partisan décidé du sens littéral des Exercices spirituels. » Pour saisir comme il convient la portée de cette déclaration, il faut se souvenir de deux choses. La première, c’est que la dialectique de l’esprit et de la lettre, du sens littéral et du sens spirituel, ne joue pas seulement dans l’interprétation de l’Écriture sainte ; elle intervient en toute exégèse. Tout texte important est en un sens inépuisable et il est toujours loisible de déployer, à partir de sa lettre, son esprit, c’est-à-dire – pour reprendre les termes de la tradition chrétienne – de dégager son sens allégorique (ses implications logiques), son sens tropologique (moral), son sens anagogique (son ouverture à l’histoire, à l’avenir). La deuxième chose à ne pas perdre de vue pour bien comprendre le père Gervais – la principale – c’est que l’esprit est dans la lettre.

Pierre Gervais a de glorieux prédécesseurs dans la recherche du sens profond des Exercices, de leur unité, de leur logique intellectuelle, spirituelle, existentielle. Je n’en citerai que quelques-uns : Erich Przywara, Gaston Fessard, Albert Chapelle. Ceux-ci, faisant œuvre de pionniers, avaient à faire admettre que le petit livre des Exercices a sa place dans la grande tradition théologique et spirituelle de l’Église. Ils ont par conséquent été conduits à déployer largement les harmoniques philosophiques, théologiques, mystiques, du petit livre en question ; bref, à développer ce que nous pouvons appeler le sens spirituel des Exercices. Dès lors, une concentration sur la lettre – pour y faire voir, bien sûr, la présence de l’Esprit – était rendue nécessaire, en un ouvrage bref, précis, collant au texte. C’est ce que nous offre le père Gervais. Le mérite exceptionnel de son écrit est de s’en tenir à ce qu’il a appelé le « sens littéral » des Exercices.

À sa lecture on ne sentira donc pas passer l’ombre de Hegel, de Kierkegaard ou de Blondel, mais de paragraphe en paragraphe, d’étape en étape, on saisira l’unité de l’œuvre d’Ignace, on verra se déployer la logique d’une expérience spirituelle.

La première question que pose le texte est celle de son unité. Le livre d’Ignace est, comme la Bible, un livre de livres. À côté ou à l’intérieur du livret principal des quatre semaines, nous trouvons le livret des « mystères de la vie du Christ notre Seigneur », des « règles pour le discernement des esprits », un véritable « petit traité de l’élection », un certain nombre d’« annotations », d’« additions » et de « remarques ». Les textes proposés au retraitant sont tantôt appelés « contemplation », tantôt « méditation », tantôt « considération ». « Jusqu’à quel point ces éléments s’emboitent-ils les uns dans les autres ? », se demande le père Gervais, et comment le font-ils ?

Le premier mérite de son ouvrage est son caractère complet, exhaustif : aucun des éléments importants de l’œuvre d’Ignace n’a été laissé de côté. Ensuite et surtout, Pierre Gervais indique la spécificité et la fonction de chacun des éléments que je viens de mentionner, sa nécessité, son lien avec les autres. Apparaît ainsi l’unité du livre d’Ignace et, du même coup, l’unité du mouvement spirituel qu’il suscite. Le rôle distinct des « contemplations », « méditations » ou « considérations » devient évident, de même que le tournant qui s’opère en certains exercices comme « la méditation des deux étendards » et « la méditation des trois hommes ».

Le lecteur découvrira ainsi, sous les apparences à première vue quelque peu disparates du texte ignatien, son caractère extraordinairement synthétique. Pierre Gervais fait voir comment les quatre semaines des Exercices synthétisent – dans une perspective originale (il n’y a pas d’autre itinéraire spirituel que les mystères de la vie du Christ, de sa conception à son ascension) – voie purgative, voie illuminative, voie unitive ; comment les semaines correspondent aux quatre sens traditionnels de l’Écriture ; comment les points de la contemplatio ad amorem – sorte de point d’orgue à la fin des Exercices – reprennent les quatre semaines de l’itinéraire.

Esprit synthétique qui s’adapte à chaque instant à la singularité du retraitant, au « point où il en est » sur le chemin universel proposé à tous : la suite du Christ, la Vita Christi (« Je suis le chemin, la vérité, la vie », Jn 14,6). D’où les constantes « remarques », « additions », « règles », alternatives entre le livre principal des semaines et le « livret des mystères de la vie du Christ », etc. C’est le génie d’Ignace que de conjoindre ainsi l’universel et le particulier. L’art de celui qui « donne les Exercices » est de pouvoir se mouvoir constamment dans ce double registre de l’universel et du singulier pour guider le retraitant.

Le père Gervais démontre qu’avec les Exercices d’Ignace, nous n’avons pas affaire seulement à un « itinéraire de l’âme vers Dieu », à un itinéraire de l’union à Dieu, mais qu’il s’y agit essentiellement d’une mystique apostolique et ecclésiale (le retraitant est invité à trouver sa place unique dans l’Église militante et il coopère à la rédemption du monde).

L’auteur ne manque pas de mettre dans une lumière particulière le cinquième point de la contemplation de la résurrection dans les Exercices : « Regarder l’office de consolation que vient exercer le Christ notre Seigneur et le comparer à la façon dont des amis ont l’habitude de se consoler les uns les autres » (ES 224). Il commente :

Certes le Christ ressuscité trouve sa joie à communiquer sa joie à ses disciples. Il la trouve aussi à la manière dont ceux-ci sont tout à la joie (…) qu’ils se communiquent les uns aux autres en proclamant le message pascal. Le Christ ressuscité exerce son office de consolation au matin de Pâques dans un acte qui, tout en le manifestant en son corps de gloire, fonde l’Église et en fait son propre corps (je souligne).

Certes, l’union du Christ et de l’Église est un mystère d’épousailles, mais n’est-ce pas une des beautés ignatiennes que de nous faire contempler, à l’intérieur de ce mystère, un mystère d’amitié ?

L’Église comme amitié. L’apostolat comme amitié.

newsletter


the review


La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

contact


Nouvelle revue théologique
Boulevard Saint-Michel, 24
1040 Bruxelles, Belgique
Tél. +32 (0)2 739 34 80