A Companion to The Eucharist in the Middle Ages
(éd.) Ian Christopher Levy (éd.) Gary Macy (éd.) Kristen van AusdallTeologia - reviewer : Pierre Gervais s.j.
Le 1er d'entre eux couvre la période qui va du Bas-Empire aux années 800. L. Larson Miller (Graduate Theological Union, Berkeley) y reconstruit, dans la mesure des sources historiques disponibles, ce dont la liturgie a hérité par la suite; J. Wawrykow (Univ. Notre Dame) y répertorie les auteurs auxquels se référera la théologie eucharistique des siècles postérieurs: Hilaire, Ambroise, Augustin, Cassien, Grégoire le Grand, Jean Chrysostome et Jean Damascène, et E. Saxon (Univ. College, Londres) termine cet ensemble par un essai sur l'art et l'architecture au terme de cette période.
Le 2e couvre la période carolingienne. M.S. Driscoll (Univ. Notre-Dame) en aborde, de concert avec E. Saxon, l'architecture et la liturgie; C. Chazelle (College of New Jersey) met au contact des premières controverses sur la présence réelle dans les milieux monastiques (Paschase Radbert et Ratramme), tout en attirant l'attention sur le fait que la messe ne revêtait pas, à cette époque, une forme précise dans l'esprit des chrétiens.
Avec le 3e ensemble, on entre dans la période qui va du xie au xiiie s. Dans une étude fouillée sur la célébration liturgique, E. Foley (Catholic Theological Union of Chicago) en arrive à la conclusion que, étant donnée l'immense diversité des pratiques, il serait utopique de prétendre pouvoir dégager de cette époque une forme type de célébration de la messe, centrant finalement son attention sur celle qui s'impose aux xiiie-xive s. à l'abbaye de SaintDenis et à Notre-Dame de Paris.
G. Macy, sj, (Santa Clara Univ.), l'un des maîtres d'oeuvre de l'ouvrage, offre par ailleurs une étude précise et fine des controverses sur la personne du célébrant, la présence réelle et la réception du sacrement telles qu'elles ont agité les milieux théologiques de l'époque, avec pour protagonistes Albert le Grand, Bonaventure et Thomas d'Aquin, pour ne citer qu'eux. Vient alors une contribution remarquable de J.Ch. Levy (Providence College, Rhode Island) sur l'apport, souvent méconnu, des canonistes à la réflexion sur le sacrement. L'A. part de Regino de Prüm et Burchard de Worms et, en passant par Gratien, en vient aux Décrétales et à leur suite, montrant comment, en tant que juristes, ces canonistes avaient conscience de faire oeuvre de théologie. M. Rubin (Queen Mary Univ., London) conclut cet ensemble par un essai sur les attitudes populaires vis-à-vis de l'Eucharistie.
Pour ce qui concerne le bas MoyenÂge dont répond le 4e ensemble, il faut sûrement relever l'article de St. E. Lahey (Univ. of Nebraska) qui explore, en en dégageant d'un trait précis les implications, une période de l'histoire du sacrement quelque peu confuse et assez peu explorée, celle à laquelle a donné lieu le nominalisme d'Ockham et de Biel - tout particulièrement en ce qui concerne la causalité sacramentelle - et qui conduira, par-delà la contestation de Wyclif en Bohême, à la Réforme.
L'ouvrage comprend 90 planches. Il est complété par un glossaire sur la terminologie de la théologie eucharistique du bas Moyen-Âge et par un index précis des auteurs et des matières. L'ensemble n'a pas d'équivalent dans la littérature francophone. Certes on pourrait songer ici à «Pratiques de l'eucharistie dans les Églises d'Orient et d'Occident (Antiquité et Moyen-Âge)» publié en 2 t. en 2009 par l'Inst. d'Études Augustiniennes, mais cet ouvrage est d'une autre facture, ensemble d'études très pointues sur des points précis de la pratique de l'Eucharistie dans le monde chrétien. Or, tout en en appelant à des compétences diverses, ce Companion constitue un ensemble unifié qui honore parfaitement l'idée de départ: celle d'introduire dans la réalité du mystère eucharistique au MoyenÂge. Il fait honneur à la recherche anglo-saxonne en ce domaine. - P. Gervais sj