En préface à ces dix textes (choisis et présentés par le
traducteur) composés entre 1985 et 1995, J.B. Metz présente
l'itinéraire biographique de sa théologie politique (caractérisée,
nous dit-il, par une confrontation non résolue avec l'Aufklärung,
l'expérience d'Auschwitz et l'irruption du tiers-monde) et son
leitmotiv: le souvenir de la souffrance des autres comme catégorie
fondamentale de tout discours chrétien concernant Dieu. Comme il
l'affirme dans Théologie comme théodicée, la question n'est pas la
Seinsfrage mais la Leidensfrage (cf. l'expression-clé Leiden an
Gott, une souffrance qui, comme celle de Job, interroge Dieu sur sa
non-réponse, ou plutôt sur sa réponse non encore parvenue). Metz ne
cesse d'évoquer le souvenir de son ami, maître et père dans la foi,
K. Rahner: son agressive fidélité à Vatican II (le commencement
d'un commencement) dans son travail d'intégration (doctrine et vie;
théologie et religion; dogmatique et mystique…). Le disciple montre
à la fois son accord (v.g. sur l'absence de souffrance en Dieu,
contre Barth, Bonhoeffer, Moltmann, Urs von Balthasar) et ses
divergences (v.g. le paradigme transcendantal-idéaliste de Rahner;
le paradigme postidéaliste de Metz… la quatrième semaine des
Exercices Spirituels pour Rahner; la troisième pour Metz et les
théologiens de la libération). Parmi les thèmes abordés retenons:
discours sur Dieu, discours avec Dieu; critique de l'expression
chrétiens anonymes; indispensabilité de l'héritage juif (sa
capacité-pour-Dieu et son incapacité à être consolé par des
mythes); inculturation et rôle des ordres religieux dans
l'avènement d'une Église polycentrique; danger de détemporalisation
(le temps est limité) et tentation d'un gnostocosme anhistorique. -
P. Detienne, S.J.