Cette nouvelle édition du livre est une preuve de l’intérêt pour cette thématique et de l’influence d’Adrien Candiard, connu par de nombreux livres le plus souvent percutants. L’originalité reste l’usage fait des Écritures et la manière dont l’A. les met en évidence, les interprète et en souligne l’actualité. La Lettre de Paul à Philémon à propos d’Onésime, cet esclave qui s’est enfui et qui, auprès de Paul, a trouvé le chemin de la foi et a reçu le baptême, est paradigmatique d’une interpellation des libertés.

Paul ne veut pas décider à la place de Philémon tout en souhaitant qu’il accueille à nouveau Onésime comme un « frère bien aimé ». « Je n’ai rien voulu faire sans ton accord, pour que tu accomplisses ce bien non pas sous la contrainte mais librement. » Paul ne donne pas d’arguments contre l’esclavage. Il montre comment le Seigneur est un Dieu qui libère et que sa grâce élève toutes les relations humaines : de l’esclavage à l’amitié en passant par la fraternité. La liberté est le centre de toutes ces transformations.

Paul parle d’expérience car son chemin de Damas fut une illumination de sa conscience dans la révélation de l’identité profonde du Christ. Tous ses efforts et toutes les lois observées basculent dans une grâce imprévue qui le renverse et à laquelle il consent. La doctrine de Paul et sa vie en seront radicalement changées. Désormais priorité à la grâce et à l’amitié avec le Christ qui est « le chemin, la vérité et la vie ». La liberté du chrétien n’est pas de mériter l’amitié de Dieu dans l’observation des commandements uniquement, mais dans l’accueil de cette amitié telle qu’elle se révèle dans les événements et dans l’initiative première de Dieu. L’amitié n’est pas une récompense, mais le salut est déjà cette amitié offerte et accueillie par la liberté humaine.

Le livre n’est pas un traité sur la liberté, mais une révélation par touches successives de certains traits de l’homme libre : depuis Adam et Ève, la question récurrente de la chasteté, les enjeux de la vie fraternelle. La Parole de Dieu nous enseigne. En fil rouge, être libre c’est consentir à la volonté divine, ne pas se fixer sur le permis et le défendu ni d’abord sur des actes à réaliser, ne pas opposer « Marthe et Marie », ne pas attendre un mérite ou une récompense pour agir. « Ce n’est pas parce que Dieu ne m’interdit rien que je dois faire n’importe quoi, sans me soucier de ma liberté de choisir le bien » (p. 85). Ces commentaires bibliques ouvrent chaque fois un horizon concret sur le mode d’expression de la liberté humaine.

La liberté est une grâce, un chemin d’alliance et d’amitié avec le Sauveur qui s’est fait homme et notre ami. Cet amour prévenant est offert : on ne peut pas le vivre par nos propres forces humaines. Il convient de consentir à cet espace où l’homme grandit et s’unit à son Dieu. La mission de l’Église est d’être au service de cette liberté de chacun. La conclusion évoque les belles figures des dix-neuf martyrs en Algérie dans les années 1990 : « saisis par le Christ, ils ont répondu à cet amour non par le sacrifice et la soumission, mais par un amour libre total » (p. 134). — A. Mt.