Il nous tarde de faire état de l'oeuvre considérable que constitue
l'établissement des tables de l'Encyclopédie Catholicisme hier,
aujourd'hui et demain de la part du P. Gérard Mathon qui avait déjà
été l'un des maîtres d'oeuvre de ces 15 volumes parus de 1950 à
2000. Les articles de l'encyclopédie suivaient un ordre
alphabétique, et non pas logique. L'apport irremplaçable de ces
Tables est précisément, par des renvois et des corrélats, d'offrir
un cadre méthodique pour toute recherche subséquente des questions
doctrinales ou historiques traitées dans l'encyclopédie en leur
donnant accès sur une base thématique. À cet objectif premier s'en
ajoute un second. En effet, les articles de l'encyclopédie ont été
rédigés sur une période de cinquante ans. Ses six premiers volumes,
de la lettre A au terme Latran s'arrêtent en 1966, et le travail
n'a pu être repris qu'en 1975, après une interruption de 9 ans.
L'esprit des deux parties est donc fort différent et correspond à
celui d'avant et d'après le Concile. Il s'agissait donc d'intégrer
le novum de Vatican II et de rafraîchir les approches théologiques,
jusques et y compris la dynamique de nouvelle évangélisation mise
en place par Jean-Paul II. Bien sûr, il ne faut pas attendre de ces
Tables ce qu'elles ne peuvent donner. Leur propos est modeste: les
dossiers qui nécessitaient un aggiornamento important ne sont pas
réécrits, mais sont prolongés par une bibliographie qui en fait
percevoir l'évolution. Des entrées nouvelles seront par ailleurs
proposées; d'autres, devenus obsolètes, sont par ailleurs
abandonnées. Nous ne pouvons rendre compte ici in extenso de
travail minutieux. Contentons-nous de mentionner quelques
illustrations. Ainsi, figurent ici un article sur Amour (oublié
auparavant?), 7 colonnes pour Bible, dont trois pour le renouveau
biblique, 3 col. pour le Bien et sa nouvelle compréhension, y
compris le Bien commun, etc. L'article Communautés Nouvelles (4
col.) ne donne que quelques points de repère de ce phénomène
complexe: définition, statut canonique, comm. charismatiques, comm.
de vie, comm. mixtes, Instituts religieux, fraternités. L'article
consacré en 1952 à Yves Congar a été rafraîchi. Pour Création, sept
col. développent ce qu'en disent l'Écriture, la théologie, la
philosophie, les sciences, les développements entre Vatican I et
II, le créationnisme, l'évolutionnisme, la position nuancée de
Jean-Paul II qui exige un saut qualitatif pour l'apparition de
l'esprit. À propos du Denzinger, Congar signalait déjà les dérives
de ce recueil de textes ecclésiastiques normatifs: présence
excessive des textes des cinq derniers papes, comme si le magistère
se réduisait à la personne des papes, disparition des textes du
concile de Constance sur le contrôle du pape par les conciles,
ainsi que de celui de Florence garantissant leur rang et leurs
droits aux Patriarches orientaux, etc. Dieu détaille par contre sur
9 col.: Dieu révélé, enseignement du magistère depuis Vatican II,
aperçus philosophiques (refus d'une théologie métaphysique, le
retour du «Dieu de Jésus Christ»), science et Dieu, alors que Dogme
(3 col.) souligne la tendance actuelle du magistère papal à élargir
le champ des «vérités définitives» très proches de
l'infaillibilité, tendance qui risque de gêner considérablement le
dialogue oecuménique. Écologie est un thème récent et de plus en
plus sensible (3 col.): définition, orientation de civilisation,
écologie et théologie de la création à partir de Gaudium et spes.
L'article Église méritait un long développement (14 col.). Lumen
gentium est la première constitution dogmatique sur l'Église, sa
mise en oeuvre après le Concile, le mystère de l'Église et les
flottements du Concile sur ce point, les implications du document,
l'ecclésiologie de communion, etc. L'Espérance est également un
thème fondamentalement renouvelé depuis 50 ans. Face à «l'espoir»
des marxistes ou athées, elle vise la vie selon l'esprit d'amour et
la résurrection. L'Évêque (6 col.) est homme de communion et de
relation collégiale avec les laïcs et avec le pape; ce qu'en dit le
nouveau droit canonique. La Famille (2 col.) a fort évolué, et
devient incertaine tout comme le mariage. On valorise le couple
plus que le parental. À partir de Vatican II, l'amour conjugal
devient le socle du sacrement de mariage et l'une de ses deux fins
primaires; les enfants sont un «don» (et non plus un «bien»). Sont
reproduits en entier les droits de la famille énoncés par le
Saint-Siège dans «la charte de la famille» de 1983. Femmes (7 col.)
développe assez longuement la promotion féminine hier et
aujourd'hui, puis dans l'Église. La revendication d'un pouvoir lié
aux ministères féminins n'a guère avancé. Foi (7 col.) remet en
valeur le cheminement de l'adhésion personnelle et communautaire
qui engage toute la personne (et pas seulement les croyances) et
l'expérience spirituelle. Gaudium et spes (6 col.) raconte la
difficile gestation et offre le plan de cette constitution
pastorale qui jetait un regard nouveau et positif sur le monde.
Genre prend la place du mot «sexe», et conteste les structures
familiales classiques, cherchant à faire évoluer la société en
intégrant féminisme et homosexualité. Gloire (3 col.) souligne
enfin l'importance de l'oeuvre de Balthasar à propos de ce thème.
Herméneutique (12 col.): le sujet est devenu important après 1955
et reconnu par la Commission biblique en 1993. D'abord limitées à
l'interprétation de la Bible, les méthodes herméneutiques se sont
ensuite appliquées aux sciences humaines, puis même en théologie et
en philosophie; mais elles ont fait naître le «soupçon» (d'où
parlez-vous?), la «distance» entre le texte et notre compréhension
actuelle, l'actualisation du texte et le retour aux différents sens
de l'Écriture. P. Ricoeur fut le grand penseur en ce domaine. Homme
(7 col.) avec les problèmes des origines, l'anthropologie
(scientifique, philosophique et chrétienne), l'homme et le cosmos.
Homosexualité (5 col.): la morale et le Droit canon face à la
reconnaissance officielle de l'homosexualité et aux mariages
homosexuels. Laïc ajoute 12 colonnes pour répondre aux avancées du
Concile et aux développements qui l'ont suivi. Le mariage et sa
théologie (12 col.) font le point sur la situation actuelle en
Occident d'un sujet si mouvant et si déroutant et présente cette
affirmation consolante: «dès qu'un amour durable est là, même si le
signe fait encore défaut, il existe déjà quelque chose du
sacrement». Pour mondialisation (5 col.), les facettes théologique,
éthique, économique, politique, internationale sont abordées.
L'article procréation (6 col.): au cours des siècles, on est passé
du «parental» au «conjugal» sans normes. On valorise le sexe, le
plaisir au détriment de la dimension relationnelle du véritable
érotisme. Nous ne pouvons qu'être reconnaissants à M. Mathon pour
cet énorme travail de mise à jour auquel il s'est attelé et qui
redonne toute sa valeur à une encyclopédie qui demeure un
instrument de travail irremplaçable dans le monde théologique
francophone. - B. Clarot