Consentement matrimonial et fiction du droit. Étude sur l'efficacité du consentement après l'introduction de la fiction en droit canonique

Emmanuel Petit
Morale e diritto - reviewer : Benoît Malvaux
C'est une étude fouillée de la notion de fiction en droit canonique que nous livre l'A., professeur de droit canonique à la Faculté de Théologie Notre-Dame, à Paris, dans cette reprise de la thèse qu'il a défendue à l'Université Grégorienne. Déjà connue par le droit romain, la fiction a parfois mauvaise presse lorsqu'on l'assimile à de la simulation. Elle pose effectivement la question du rapport du droit à la vérité ou à la réalité des faits, et donc des limites du droit. Cependant, en droit canonique, particulièrement dans le domaine du mariage, elle poursuit toujours un but de «guérison», visant à rendre légitime l'union et la filiation. En ce sens, elle est étroitement liée à la dimension guérissante de l'amour conjugal et du mariage. Telle est la thèse fondamentale qui traverse l'ouvrage. L'A. adopte d'abord une démarche historique, en retraçant l'évolution de la fiction depuis sa redécouverte à fin du Moyen Âge. Bartole, professeur à l'université de Pérouse (1314-1357), joua un rôle déterminant dans cette renaissance. Mais le droit canon a vu l'apparition de fictions dès les Décrétales de Grégoire IX au xiiie siècle. Dans les deuxième et troisième parties de l'ouvrage, l'A. étudie particulièrement quatre fictions actuelles dans le droit canonique du mariage. Les deux premières sont dites «translatives de rétroactivité». Il s'agit de la légitimation par mariage subséquent, régie par les canons 1139 et 1140, en vertu de laquelle les enfants illégitimes sont légitimés par le mariage subséquent de leurs parents, et de la sanatio in radice, objet des canons 1161 à 1165, qui permet à l'autorité compétente de convalider un mariage nul sans renouvellement du consentement. Les deux autres fictions examinées sont dites «positives de putativité». Il s'agit du mariage putatif, mariage nul célébré de bonne foi au moins par une des parties (canon 1061 §3), qui produit certains effets dans le domaine du droit (canon 1137) et de la suppléance de juridiction, mieux connue sous l'expression fameuse Ecclesia supplet (canon 144), qui permet, à certaines conditions, de reconnaître comme valide un mariage célébré sans respecter la forme canonique. Chacune de ces institutions canoniques fait l'objet d'une étude historique approfondie dans la législation, la jurisprudence et la doctrine canoniques.L'ouvrage a la technicité d'une thèse et demande une culture juridique et canonique solide pour pouvoir être lu avec fruit. Il montre bien le fondement d'une institution qui, au-delà d'une simple dimension technique, a correspondu à une christianisation de la doctrine juridique. - B. Malvaux sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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