Correspondance. 1953-1969
Marguerite Hoppenot Marc BoegnerStoria del pensiero - reviewer : Marie-Jeanne Coutagne
Le pasteur Marc Boegner (1881-1970), au charisme exceptionnel, est une des grandes figures du protestantisme français contemporain. Président de la Fédération protestante de France, docteur en théologie, membre de l’Académie française, il a porté sa vie durant, en assumant de nombreuses responsabilités, une « exigence œcuménique » qui fait de lui un véritable pionnier du rapprochement entre les Églises chrétiennes. En 1953, le pasteur Boegner rencontre par le biais d’une cousine Marguerite Hoppenot (1901-2011), la fondatrice du mouvement Sève, une fraternité spirituelle au sein de l’Église catholique, qui entend aider les personnes en quête de sens à grandir spirituellement dans l’écoute permanente de l’Esprit de Dieu à la suite du Christ. Entre Marc Boegner (M.B.) et Marguerite Hoppenot (M.H.), c’est le début d’une amitié spirituelle très forte jusqu’à la mort du pasteur en 1970. Ce dialogue, original encore aujourd’hui, engage les deux épistoliers « dans la voie exigeante du mystère d’unité vécu à la lumière de la vie trinitaire ».
C’est leur correspondance, qui est ici rassemblée et qui témoigne du caractère providentiel de leur rencontre. M.B. évoque la souffrance de ne pouvoir partager l’eucharistie avec son amie, mais il ajoute qu’elle peut avoir un sens. Ainsi se dessinent ici peu à peu deux itinéraires spirituels qui s’éclairent en regard l’un de l’autre. M.B. et M.H. vécurent par-delà les divisions de leurs Églises dans lesquelles ils sont profondément enracinés, une communion qui trouve sa force et sa vérité dans la foi et l’amour du Dieu Trinité. Comme le dit M.B. : « J’ai compris plus clairement que notre amitié n’a de sens et de poids que parce que vous êtes ce que vous êtes : une catholique romaine, pleinement convaincue de la vérité de son Église infaillible, et que je suis ce que je suis : un pasteur pleinement convaincu que son Église est dans la Vérité du Christ. » Rencontre de deux chrétiens d’exception sans doute, mais pas seulement. Il s’agit de ce que M.B. comme M.H. nomment « une mise en commun » nécessaire, délicate, parfois tendre, toujours respectueuse et fraternelle. Lorsque la correspondance s’interrompt par la mort du pasteur Boegner, elle laisse entrevoir que les travaux du Concile Vatican ii (M.B. y participe comme observateur aux 3e et 4e sessions) ne font que confirmer les intuitions de ces deux âmes profondément enracinées en Christ et lumineuses d’espérance. — M.-J. Coutagne