La Grèce veut la stabilité, le Christianisme met en mouvement. L'un s'alliant à l'autre, le devenir finit par se stabiliser (c'est là l'essence de la critique qu'Emanuel Severino fait au nihilisme occidental), et les prétentions à savoir à se déstabiliser (d'où notre âge de multiples relativismes). Les deux chapitres principaux de ce petit ouvrage montrent comment le nihilisme contemporain, en chiasme de grécité et de christianité, se présente chez Dostoïevski et Heidegger (dont on expose avec finesse les catégories essentielles). L'A. fait poindre son exposé en direction d'une réflexion qu'il a déployée de manière plus précise ailleurs (par exemple dans son livre Le Dieu possible. Expérience du christianisme, 2002).
L'essence du nihilisme, dont aucune rédemption ne pourra venir même si nous avons besoin de salut (de façon significative, l'A. a publié en 1995 un ouvrage intitulé Christianisme sans rédemption), tient en ceci: notre situation est nihiliste car elle se définit par «la possibilité de la possibilité et de l'impossibilité» (p. 83) - c'est dire que l'origine, le principe, la cause première, tout cela s'efface dans l'abîme de l'indiscernable dont pourtant nous vivons nécessairement jour après jour. - P. Gilbert sj