Dieu est nu. Hymne à la divine fragilité
Simon Pierre Arnold osbSpiritualità - reviewer : Isabelle de la Garanderie
Simon Pierre Arnold, moine bénédictin belge vivant au Pérou depuis plus de 45 ans, est un ardent promoteur d’une théologie « andine », liée à la culture et à la spiritualité des peuples amérindiens. Dans cet ouvrage, l’A. explore la radicalité de la kénose de Dieu en Jésus-Christ et toutes les implications de celle-ci pour notre vie chrétienne.
Déblayant à grands traits nos représentations trop tenaces d’un Dieu imaginaire qui serait une forme de super-héros, le bénédictin s’attache à nous montrer un Dieu incarné vulnérable, bouleversant toute hiérarchie, jusqu’à se tenir à genoux devant ses disciples pour leur laver les pieds. C’est dans la contemplation des attitudes du Christ – « Je me tiens à Jésus seul » est une phrase qui scande l’ouvrage du début à la fin – que l’A. esquisse quelques pistes pour revisiter la fragilité de notre propre humanité et ses relations. C’est là que le « paradigme monastique » prend toute sa place, s’appuyant notamment sur Panikkar et sur la littérature mystique. De manière plus large et vraiment pour tous, le rappel de notre finitude en lien avec le mystère pascal est joliment déployé : « La croix et la résurrection ne sont pas deux moments concurrentiels de notre foi, mais bien deux voix sur la même portée musicale du mystère (…). Il s’agit pour l’homme et la femme de construire leur liberté ensemble en s’appropriant leur mortalité sans laquelle toute libération est mensonge » (p. 164-165). Les derniers chap. revisitent des concepts qui sonnent comme autant de défis pour aujourd’hui : la mission, le salut et enfin la communauté chrétienne, repensée à partir de la Visitation et de la force libératrice de partager ensemble nos pauvretés.
Si certains aperçus sont profondément saisissants, on regrette la virulence d’autres pages sur une Église toute-puissante, jugement qui semble manquer de nuances en plus d’être parfois surchargé de vocabulaire technique. De plus, à vouloir se dégager de celle-ci, ne risque-t-on pas de s’écarter justement d’une autre forme d’acceptation de notre propre fragilité, ensemble, en Église sainte mais formée de membres pécheurs ? — I. Payen de la Garanderie