Dogmatique pour la catholicité évangélique. Système mystagogique de la foi chrétienne. IV. L'affirmation de la foi: Anthropologie théologique, 1. Problématique scientifique et philosophique
Gérard Siegwalt
Teologia
-
reviewer :
Yves Labbé
À la suite de sa cosmologie, le théologien protestant de Strasbourg
présente le premier volet de son anthropologie, septième volume de
sa Dogmatique. Une première partie revient sur les catégories
classiques de l'anthropologie philosophique: le corps, l'âme, la
raison, enfin l'esprit. Elle dénonce pour finir un double
rétrécissement de la pensée occidentale: d'un côté, d'Augustin à
Luther, par une attention exclusive portée au péché et au salut; de
l'autre côté, à partir de Descartes, par une réduction de toute
chose à l'homme. La seconde partie de l'ouvrage rassemble les
données élémentaires de l'humanité des hommes, depuis la vie
jusqu'à la mort. Un heureux développement sur le droit naturel y
confirme la confiance placée par Siegwalt dans l'ordre de la
création, qui se découvre au philosophe comme une transcendance
dans l'immanence: ainsi une transcendance absolue de l'humain au
milieu de ses réalisations historiques relatives.Contraint à
seulement quelque 200 pages, le nouveau volume de la Dogmatique ne
pouvait offrir toutes les justifications appelées par une matière
foisonnante. On y relève toutefois des références privilégiées
ainsi que des déterminations appuyées. Le théologien préfère
l'optimisme thomiste au pessimiste augustinien, également
l'ouverture des archétypes jungiens à la clôture des analyses
structurales. De même, le dualisme apparaît résumer tout ce qu'il
récuse dans l'anthro¬po¬logie scientifique et philosophique. La
vérité de l'homme réside dans la relation, l'interaction, la
dialectique: entre la structuration de l'être et le vécu de
l'existence, entre l'immanence et la transcendance, entre le fond
et la forme, dont la corrélation commande le trajet qui mène du
corps à l'esprit à travers l'âme et la raison.
Après avoir interrogé la sagesse, Siegwalt se mettra à l'écoute de
la prophétie. Si la défense ici présentée d'une pensée de la
relation emporte aisément l'adhésion, j'éprouve de la résistance
face au crédit accordé au symbolisme jungien comme face à un
certain effacement des figures du mal. Il est probable que le motif
en soit sembable: une réserve à l'égard d'une vue trop harmonieuse
de la réalité. Même si le mal reste promis à un retour prochain,
avec l'examen de la position de l'homme devant Dieu, ne
convenait-il pas de reconnaître déjà que la souffrance implique une
altérité hostile, celle d'un soi tourné contre soi, avant de
pouvoir rencontrer une altérité positive (cf. p. 189)? J'exprime
enfin un souhait modeste: que le prochain volume s'achève sur une
récapitulation des propositions majeures d'une anthropologie
théologique qui poursuit un projet d'une ampleur exceptionnelle
avec une grande générosité oecuménique. Même s'il ne propose qu'un
demi-parcours, le présent volume aurait gagné à se terminer sur une
conclusion. - Y. Labbé.