Hugues de Saint-Cher (+1263), bibliste et théologien. Études réunies par L.-J. Bataillon, O.P., G. Dahan et P.-M. Gy, O.P.
Col.
Teologia
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reviewer :
Hubert Jacobs
On saluera avec joie la parution de ce volume qui reprend la
vingtaine d'études présentées lors d'un colloque international tenu
à Paris en mars 2000. L'action du cardinal Hugues de Saint-Cher
(†1263) n'était pas inconnue des historiens, mais son oeuvre
n'était guère étudiée. On trouvera ici des aperçus sur ses apports
comme exégète, comme prédicateur, comme théologien. Au seuil de
l'ouvrage, Jacques Verger reconnaît combien la vie du grand
dominicain nous demeure enrobée d'obscurités. Quelques étapes de sa
carrière, plus ou moins datées, ont été repérées, mais ses
origines, son milieu et sa personnalité nous échappent en très
grande partie. À peine peut-on assurer seulement qu'il est
originaire de Saint-Cher, aujourd'hui Saint-Chef, chef-lieu de
canton de l'Isère. Mais on ne sait rien ni de sa date de naissance,
ni de sa situation sociale. Heureusement le religieux nous est
mieux connu. Il n'appartenait pas au groupe primitif des compagnons
de saint Dominique, arrivés à Paris en 1217, et qu'il ne rejoignit
que dans les années 1220. Le regretté Pierre-Marie Gy nous expose
ce que l'on sait du Frère prêcheur qu'il a été. Il entra dans
l'Ordre avec Humbert de Romans et fut souvent prieur ou provincial.
Il fut fait cardinal par Innocent IV en 1244. Son oeuvre de
bibliste est analysée par Gilbert Dahan. S'il n'a pas de théorie
générale sur l'exégèse, H. de S.-C. propose cependant à son sujet
de fréquentes réflexions qu'il est surtout utile d'examiner dans
leur pratique. Ainsi, le prologue de la Genèse privilégie les
quatre sens de l'Écriture figurés par les quatre couleurs d'Ex
26,1: le lin blanc renvoie à la vérité de l'histoire, l'hyacinthe à
la subtilité de l'allégorie, l'écarlate à l'anagogie et la pourpre
à la tropologie (p. 77). Les autres quadripartitions scripturaires
sont également évoquées plus d'une fois à ce propos. C'est avec
intérêt qu'on lira, sous la plume de Martin Morard comment H. de
S.-C., commentant les psaumes, compare le Christ à un maître
faisant son cours: on y découvre toute une réflexion sur les
étudiants à l'étude.
Revenant sur la question des quatre sens de l'Écriture, M.M.
remarque que le sens anagogique est le parent pauvre du commentaire
sur les psaumes, qui privilégie l'interprétation christologique et
mystico-morale. Mais il y relève aussi l'atrophie de la prise en
compte du sens littéral (p. 138). Cherchant à savoir comment la
consultation d'H. de S.-C. peut l'aider à comprendre les textes de
saint Thomas d'Aquin, le P. Gilles Berceville, grâce à quelques
sondages, pense pouvoir dire que Thomas, en commentant les
évangiles, utilise les postilles d'H. de S.-C., non pas
massivement, mais pas non plus de manière insignifiante. Ce travail
de comparaison met donc surtout en lumière la valeur de l'oeuvre de
saint Thomas. - H. Jacobs sj