La «dignité humaine», que reconnaissait explicitement Kant, a pris
une place de plus en plus importante dans certains débats récents.
Chez Kant, la dignité était liée à la perception de l'homme comme
sujet moral ne pouvant être considéré comme moyen mais seulement
comme une fin. Mais, après la seconde guerre mondiale, le concept
s'est transformé en principe juridique; on le retrouve en
particulier dans la «Déclaration universelle des droits de l'homme»
(1948) et dans certaines Constitutions des États. La dignité
humaine doit donc être respectée; encore s'agit-il de reconnaître
quand et comment elle peut être bafouée. «Si on insiste
unilatéralement sur la dimension individuelle de la dignité en la
reliant aux capacités et aux prestations, s'ouvre un énorme
problème: non seulement, en effet, ne seraient généralement pas
protégés les embryons, mais tous les êtres humains vivants - pour
ne pas parler des morts - qui ne sont pas encore ou ne sont plus en
mesure de se présenter comme partenaires d'une interaction. Et ils
sont nombreux: les nouveaux-nés, les petits enfants, les malades
mentaux graves, les vieillards atteints de problèmes psychiques
liés à leur état stérile, les individus réduits à la vie végétative
en coma irréversible ou même en état de mort cérébrale, tous
ensemble définissent un lot de situations existentielles face
auxquels ne vaudrait plus la garantie de la dignité humaine.» (p.
93-94) - S. Decloux sj