Pour la charité, il s'agit de nous rejoindre par le sommet. Ce n'est que par une conversion toujours reprise que nous marchons avec humilité dans une solidarité avec Celui qui est au-delà de tout. Si toute institution a ses défauts (elle demeure humainement limitée et appelée à la métanoia), je reste quand même un peu mal à l'aise face au syncrétisme de l'A., qui ira un temps jusqu'à vouloir concilier dans sa vie de dominicain mariage et vie religieuse. Le Saint-Esprit finira par nous réunir, mais il ne faut pas gommer trop vite les différences. La véritable unité est dans le détachement et l'ouverture à la vie de l'Esprit en nous: catholicisme, orthodoxie - l'A. est devenu prêtre orthodoxe -, hindouisme, tibétisme (on parle à peine de l'islam) émergent peu à peu à un mûrissement dont nous devons respecter l'évolution et la lenteur.
On n'ouvre pas les fleurs avec les doigts mais en leur permettant de s'épanouir, vers une harmonisation qui n'a rien d'artificiel. Le titre du livre, «l'absurde et la grâce», me semble très riche. La compassion infinie de celui qui s'assied à la table des pécheurs et appelle les pécheurs et non les justes, et les met spécialement en valeur, sont pour nous une formidable leçon d'humilité et de solidarité. L'essentiel n'est pas la simple correction sans assez d'amour, ni l'orthodoxie durcie et fermée dans une science suffisante, ni les institutions si sacrées soient-elles, mais la vie divine trinitaire qui sourd en nous et doit pouvoir s'épanouir librement.
Livre passionnant, très enrichissant pour la réflexion, mais qui réclame un discernement, si nous ne voulons pas dévier dans notre écoute. Ce n'est pas le soleil qui nous blesse, ce sont nos yeux qui ne sont pas préparés à tant de lumière. - G. Navez, S.J.