Ce livre est une confession-confidence brûlante, engagée, celle d'une recherche continuelle au-delà du fond de non-sens d'une vie d'abord sans amour et sans consistance. Partant de la révélation de l'Écriture: «Je suis», l'A. découvre qu'«infiniment plus est en nous». De sceptique, il devient un chercheur de lueurs mystiques ouvrant sur un au-delà. Il va rouler sa bosse dans tout l'univers avec un accueil passionné de tout ce qui lui semble éclairage de l'Esprit. Ce qui le meut, ce ne sont pas les idées ni les institutions, mais l'expérience de vie, une quête de charité divine et de compassion fraternelle; il se veut disponible à ce mystère lancinant. Il prend conscience que Dieu lui-même vient sauver ce qui était perdu. La grâce se joue même de l'absurdité d'une vie. Le christianisme est l'art de vivre dans l'harmonie des contraires qui se rejoignent en Dieu: ainsi Dieu justice et miséricorde (il n'est pas justicier mais bien plus: justifiant), Dieu l'infini et l'effacé, Dieu mort et source de vie, etc.
Pour la charité, il s'agit de nous rejoindre par le sommet. Ce n'est que par une conversion toujours reprise que nous marchons avec humilité dans une solidarité avec Celui qui est au-delà de tout. Si toute institution a ses défauts (elle demeure humainement limitée et appelée à la métanoia), je reste quand même un peu mal à l'aise face au syncrétisme de l'A., qui ira un temps jusqu'à vouloir concilier dans sa vie de dominicain mariage et vie religieuse. Le Saint-Esprit finira par nous réunir, mais il ne faut pas gommer trop vite les différences. La véritable unité est dans le détachement et l'ouverture à la vie de l'Esprit en nous: catholicisme, orthodoxie - l'A. est devenu prêtre orthodoxe -, hindouisme, tibétisme (on parle à peine de l'islam) émergent peu à peu à un mûrissement dont nous devons respecter l'évolution et la lenteur.
On n'ouvre pas les fleurs avec les doigts mais en leur permettant de s'épanouir, vers une harmonisation qui n'a rien d'artificiel. Le titre du livre, «l'absurde et la grâce», me semble très riche. La compassion infinie de celui qui s'assied à la table des pécheurs et appelle les pécheurs et non les justes, et les met spécialement en valeur, sont pour nous une formidable leçon d'humilité et de solidarité. L'essentiel n'est pas la simple correction sans assez d'amour, ni l'orthodoxie durcie et fermée dans une science suffisante, ni les institutions si sacrées soient-elles, mais la vie divine trinitaire qui sourd en nous et doit pouvoir s'épanouir librement.
Livre passionnant, très enrichissant pour la réflexion, mais qui réclame un discernement, si nous ne voulons pas dévier dans notre écoute. Ce n'est pas le soleil qui nous blesse, ce sont nos yeux qui ne sont pas préparés à tant de lumière. - G. Navez, S.J.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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