Le champ de l'éthique biomédicale ne cesse de s'élargir du stade
embryonnaire de la vie humaine jusqu'à sa fin, sans omettre le
génie génétique, les greffes d'organe et les neurosciences. Le P.
O. de Dinechin, membre durant huit ans du Conseil consultatif
national d'éthique en France, s'exprime ici en moraliste catholique
informé des données scientifiques, des implications morales et de
l'état des opinions. Le titre de l'ouvrage indique le souci de
l'A.: dans le corps humain étudié, manié, remanié peut-être par les
biosciences, faire entrevoir l'homme à respecter, à servir, à
aimer. La table des matières montre la richesse d'un livre qui met
à la portée du lecteur cultivé le discernement de la moralité de
gestes médicaux concrets. Greffes d'organe: avec l'Épiscopat
français, l'A. encourage cette «forme éloquente de fraternité» (p.
28), tout en n'oubliant pas la réflexion nécessaire sur la
détermination du moment de la mort (p. 34). Le consentement éclairé
est nécessaire aux expériences sur l'homme (p. 41). Le respect est
dû à l'embryon comme à une personne «en devenir» (p. 54). Le sort
des embryons congelés (p. 58-59) trouve l'A. hésitant devant la
décision de les laisser mourir (décision reconnue légitime par le
P. Verspieren et le Cardinal Lustiger). À propos de la fécondation
in vitro homologue, de Dinechin évoque les «gestes décisifs»
qu'elle suppose (p. 68-69) et en distingue les «significations
objectives» dégagées dans Donum vitae et les
«significations vécues» (p. 70). Il est courtoisement mais
fermement opposé à la FIVD (avec donneur étranger au couple) et
n'est guère favorable à l'anonymat du donneur (p. 73).
Le diagnostic prénatal - de soi moralement légitime - suscite la
grave tentation d'un eugénisme (p. 77) hygiénique défendu sans
vergogne par certains (p. 80). La réflexion sur le contrôle de
l'usage des tests génétiques est marquée des prudences du droit
français (p. 84s.). Le clonage (reproductif,) «un véritable
non-sens» (p. 93), est seulement évoqué. Les neurosciences
permettent de mieux discerner l'inné, sans pour autant connaître
l'acquis (p. 101), elles posent des questions morales distinctes
selon qu'il s'agit (Fr. Quéré) du jouissif (euphorisant), du
«performatif» (dopage) ou du répressif (délinquance sexuelle) (p.
104). Le chapitre sur la mort dans la dignité (p. 111) et la lutte
contre la douleur (p. 112, soins palliatifs) est particulièrement
vif: «donner la mort, un abus du pouvoir médical» (p. 115).
L'expression d'euthanasie passive, note justement l'A., est ambiguë
et à éviter puisqu'il ne s'agit pas de mort directement provoquée.
Une annexe (p. 125-126) donne sigles et définitions des gestes
engagés dans les procréations médicalement assistées. «La réflexion
du P. de Dinechin… net dans ses convictions et nuancé dans ses
jugements…, aidera à prendre conscience des questions essentielles
soulevées par la progression des sciences médicales« (Y. de
Gentil-Baichis, p. 9). - A. Chapelle, S.J.