Dans le récit biblique, l'intrigue joue un rôle essentiel, mais
comment l'attention à son déroulement nous permet-elle d'atteindre
l'intention de l'A. et la manière dont il interpelle le lecteur?
Tel était, en gros, le propos du 4e colloque international du
Réseau de Recherche en Analyse Narrative des textes Bibliques
(rrenab). Il se déroulait à Laval, au Québec, en juin 2008. Ce
volumineux ouvrage nous met en contact avec les contributions des
chercheurs; il est doté d'un sommaire en anglais des interventions
qui se faisaient en langue française. Nous y trouvons une grande
richesse de réflexions et d'analyses scientifiques. Trois parties
le composent: sept études générales concernant l'intrigue, six
groupes de travaux de séminaire sur le thème «Récit et intrigue»,
cinq ateliers concernant des passages scripturaires
précis.Impossible de rendre compte de l'abondance et de la variété
des approches, mais on peut en donner une idée et informer ainsi le
lecteur sur les textes traités et les thématiques abordées. Dans la
ie partie, épinglons: Sens de l'intrigue et autorité des témoins
pour cautionner le récit (J. Villeneuve, Montréal); la troisième
dimension de l'intrigue chez Marc (Y. Bourquin et D. Marguerat,
Lausanne) et sa réalisation en Mc 14 et Lc 22; une approche
sémiotique de l'intrigue, avec lecture de Mc 14,53-72 et Jn 2,1-11
(L. Panier, Lyon 3; J.-Y. Thériault, Rimouski; A. Fortin, Laval);
l'utilisation de l'approche narrative en sciences humaines et
sociales (G. Jobin, Laval). La 2e partie nous livre des études en
dialogue: le prophète mis en récit (E. Di Pede, Metz; A. Wénin,
LLN; C. Combet-Galland, Paris); la ruse et l'ironie dans les récits
bibliques (A. Wénin, LLN; A-.L. Zwilling, Strasbourg,: Gn 27 et 29;
D. Luciani, LLN: Jg 13-16); le jeu entre causalités humaine et
divine (S. Ramond, Paris: Sg 11-19; M. Berder, Paris: Lc-Ac);
suspense, curiosité, surprise et mise en intrigue (N. Bonneau,
Ottawa: Mc 5,1-20; Y. Mathieu, Ottawa: Lc 1,26-38; A. Spatafora,
Ottawa: Jn 9); rhétorique et narrativité (M. Roberge et A.
Pasquier, Laval: Jn 6,35-58 et 20,1-33); Paul et la narrativité en
Rm 5-8 (A. Gignac et J.-S. Viard, Montréal; R. Burnet, Paris; J.
Doutre, Montréal). Enfin dans la 3e partie, quelques études
narratives: M. van Treek Nilsson, LLN: métaphore et engagement du
lecteur; B. Oiry, LLN: raconter le simultané en 1 Sm 27 et 2 Sm 1;
R. Hurley, Laval: empires et royaumes en intrigue en Ac 4,32-5,11;
S. Butticaz, Lausanne: ecclésiologie ambivalente des Actes; P.
Fabien, Lausanne: qu'est-ce qu'interpréter? Ac 8,26-35. Le volume
s'achève par les index indispensables: onomastiques et citations
bibliques. Une oeuvre généreuse et touffue qu'on doit reprendre à
l'aise et selon les besoins.Une question se pose à la suite de ce
volumineux dossier: la science exégétique devient tellement
pointue, nuancée et complexe sur le plan de l'analyse littéraire,
psychologique et sociologique qu'on se demande parfois si le
message appelé théologique ou tout simplement spirituel parvient
encore à passer à travers pareille dissection. On se prend à
espérer un prophète tout simple pour faire souffler l'Esprit saint
sur ces ossements desséchés. Tous ces éléments qui constituent
l'intrigue ne sont, après tout, que des outils de travail… N'est-ce
pas le tribut à payer à notre ère de complexité et de complication?
Esprit de finesse ou esprit d'analyse? - J. Radermakers sj