Même chez Kant, même chez le philosophe le plus prudent pour que la liberté ne soit pas envahie par une hétérogénéité, il y a des traces d'altérité: les apories auxquelles s'affronte La Religion dans les limites de la simple raison en est un signe évident. Le mystère de l'homme l'empêche de s'enfermer en lui-même, même lorsqu'il s'agit pour lui de penser avec audace, de prendre l'entière responsabilité de ses actes. Les penseurs parcourus témoignent tous de la même exigence. Que ce soit Vico, Alphonse de Liguori, Kant comme on vient de le dire, Drey (le fondateur de l'école de Tübingen), Rosmini, Bonhoeffer, Guardini, Lévinas, Mancini ou notre contemporain Vitiello, professeur à Salerno, athée et ami de Mgr F., tous ont insisté sur l'impossibilité pour la conscience de s'enrouler sur elle-même afin de poser des jugements éthiques corrects, c'est-à-dire simplement humains.
L'ouvrage s'attelle ainsi au problème de la fondation de l'éthique, sans en revenir aux thèses d'une objectivité «pure et abstraite» (p. 8) du bien; il s'agit plutôt de rejoindre «la profonde nostalgie du coeur humain, sa structure inquiète et problématique» (ibid.). - P. Gilbert sj