Le droit liturgique a souvent mauvaise presse. On l'accuse de conduire au rubricisme, au respect pointilleux des normes, au détriment du but fondamental de la liturgie, le culte à rendre à Dieu. Pour l'A., prêtre de l'Opus Dei et professeur de droit canonique à Lyon, cette accusation n'est justifiée que dans la mesure où on considère le droit juridique dans une perspective restreinte et positiviste. Effectivement, si on réduit le droit liturgique à un ensemble de normes et de lois, le risque d'appauvrissement et de perversion de ce droit est réel. Tout autre est l'approche réaliste, que l'A. fait sienne, qui part des exigences de justice découlant du donné objectif de la vie ecclésiale. Dans cette perspective, prévaut le droit fondamental des fidèles à ce que l'autorité ecclésiastique gouverne la liturgie afin que celle-ci ne soit la propriété privée, ni du célébrant, ni de la communauté dans laquelle les mystères sont célébrés. Plutôt que de droit liturgique, on parlera alors d'une dimension juridique du sacré, qui existe pour que les fidèles puissent pleinement assumer la tâche de sanctification à laquelle ils sont appelés.
L'A. développe son argumentation en trois temps. Une 1e partie de l'ouvrage retrace le processus historique de formation de la liturgie et des normes juridiques qui la régissent. Si des traditions liturgiques voient rapidement le jour, le «droit du sacré» en tant que tel ne se formalise qu'au début du deuxième millénaire, lorsque le droit canonique prend véritablement forme. Et ce n'est qu'au xixe s. que le juridisme va dominer la liturgie, entraînant un véritable appauvrissement du droit liturgique. Plus récemment, Vatican II va profondément renouveler l'approche de la liturgie, en assouplissant les normes et en associant tous les fidèles à la liturgie.
La 2e partie de l'ouvrage, qui en constitue le coeur, approfondit la dimension juridique du sacré, dans la perspective réaliste présentée cidessus. Le canon 213 joue ici un rôle fondamental, en rappelant que les fidèles ont le droit de recevoir des pasteurs sacrés l'aide provenant des biens spirituels de l'Église, surtout de la Parole de Dieu et des sacrements. La hiérarchie (du souverain pontife aux évêques diocésains, en passant par les dicastères romains et les conférences des évêques) exerce ici une autorité régulatrice. Les normes qu'elle produit ne sont jamais que la déclaration autorisée des devoirs et des droits qui se fondent sur les sacrements. En ce sens, la force obligatoire de la loi ne tient pas primordialement au pouvoir dont elle émane mais bien au fait qu'elle règle une dette de justice. En raisonnant ainsi, on évite l'écueil du positivisme, dans lequel tombent souvent les commentateurs des normes liturgiques. Il convient donc de lire ces normes à la lumière dudroit et du devoir des fidèles à recevoir les moyens de salut, auxquels correspond le droit de l'Église à conserver dans son intégrité le patrimoine commun et indivisible des fidèles.
La 3e partie de l'ouvrage, plus concrète, traite des droits et des devoirs des fidèles relatifs aux sept sacrements. L'A. développe particulièrement les normes promouvant la participation active des fidèles, qui est une dimension constitutive de la liturgie. Il examine ainsi de nombreuses questions pratiques, comme le droit des petits enfants au baptême, la communion des fidèles dans la main ou sur la langue, l'homélie réservée au prêtre, la possibilité de se confesser pendant la messe, les absolutions collectives, l'ordination réservée aux hommes, etc.
On l'aura compris: l'intérêt de l'ouvrage réside principalement dans la perspective avec laquelle il aborde la liturgie et le droit qui la gouverne. En les enracinant dans l'exigence de justice, qui demande que les devoirs et les droits des fidèles soient respectés, il leur donne sens et permet de les vivre de manière réfléchie et harmonieuse. - B. Malvaux sj

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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