Originaire de Sicile, jeune prêtre employé dans l'administration de
l'Église de Rome, J.-B. Sidotti (ou Sidoti) se découvre
soudain une vocation héroïque pour le Japon, pays où aucun
missionnaire n'avait pu pénétrer depuis longtemps. Débarqué
clandestinement sur une petite île méridionale, il est aussitôt
arrêté, interrogé (à l'aide des quelques résidents hollandais,
seuls étrangers tolérés et confinés dans un minuscule comptoir
commercial), puis transféré vers la capitale. Promis à une
exécution rapide ou à des tortures destinées à lui faire abjurer sa
foi, son destin bascule : un lettré confucéen, érudit curieux
des choses d'Occident et conseiller influent auprès des shôguns,
est chargé de l'enquête. Les interrogatoires, qui prennent parfois
l'allure d'échanges scientifiques et culturels, alimenteront
plusieurs ouvrages rédigés par le conseiller et modifieront l'image
que les Japonais se feront de l'Europe jusqu'à l'ouverture du pays
un siècle et demi plus tard. Il est finalement décidé de condamner
Sidotti à la prison à vie. Lorsqu'il s'avère qu'il a baptisé ses
deux geôliers, on le laisse mourir de faim. Cette « histoire
secrète » se lit comme un récit historique doublé de la
chronique d'une enquête. À la différence du livre récent de
Torcivia (cf. p. 650), celui-ci se fonde surtout sur
d'abondantes archives japonaises ; il propose de fines
observations suggérées à l'auteure par sa connaissance de la
culture et de la psychologie japonaises. Les deux ouvrages se
complètent donc heureusement pour faire revivre une figure méconnue
et attachante. - J. Scheuer s.j.