Les spécialistes n'y trouveront pas leur compte, opine l'A.,
prêtre, longtemps professeur de religion dans une École Normale.
Son ambition, nous dit-il, se résume à présenter un «aperçu global
et schématique» de l'histoire de l'Église, située dans le contexte
politico-socio-culturel de l'époque patristique, laissant à
d'autres la tâche de poursuivre son oeuvre à travers le Moyen Age
et la Renaissance. L'étude s'étend du judéo-christianisme et de
l'âge apostolique jusqu'aux querelles christologiques
prémédiévales, en notant les différents développements (p. ex. en
matière de liturgie, de hiérarchie etc.). L'A. y présente la vie et
les oeuvres des théologiens qu'il rencontre en cours de route. Jean
Chrysostome et Augustin sont abondamment cités. Jérôme est
allègrement campé: caractère ombrageux, opportuniste, irritable,
agressif; commentaires superficiels, argumentation alambiquée,
malmenant le texte (de l'Écriture) au service de sa thèse. De
Tertullien nous retenons: «C'est déjà un homme ce qui va le
devenir». De Cyprien: «Il ne peut avoir Dieu pour Père celui qui
n'a pas l'Église pour mère». D'Hippolyte: «Que tous les fidèles,
dès le réveil, se lavent les mains et prient Dieu». Le texte est
illustré de superbes citations (p. ex. la définition du vrai
gnostique, dans les Stromates; la note circulaire de Licinius
concernant les chrétiens), qui en constituent le principal attrait.
L'A. évoque au passage notre liturgie post-conciliaire: à propos de
la Catéchèse mystagogique, il préconise d'avancer le baiser de paix
jusqu'avant l'offrande, et de retarder les intercessions
jusqu'après la consécration; il prône le baptême par immersion, «un
rite qui a bien de la peine à retrouver la place qu'il mérite» et
la communion à la coupe «sans la faire passer de main en main». Il
nous décrit un temps où un cabaretier ne pouvait être admis au
baptême, où la pénitence canonique (qui n'était pas accessible aux
clercs) contraignait le pénitent à observer la continence totale et
définitive (au grand dam de son épouse!) et à exercer le rôle de
fossoyeur bénévole. Le texte n'est pas dépourvu d'ambiguïtés:
lorsqu'il parle d'un Cyrille ou d'un Grégoire, l'A. laisse au
lecteur le soin de deviner s'il s'agit de Jérusalem ou
d'Alexandrie, de Nazianze ou de Nysse. Et lorsqu'il nous apprend
que Clément (d'Alexandrie) était capable de distinguer le
bouddhisme de l'hindouisme, nous aimerions une référence.
L'ouvrage, recommandé pour son exposé clair, son style familier,
son texte bien aéré, est enrichi d'un index onomastique qu'un
«décalage» dans les numéros de pages rend difficilement utilisable:
155 renvoie à 153; 420 renvoie à 416, etc. - P. Detienne, S.J.