Le successeur de Pierre. L'institution divine du souverain pontificat de l'évêque de Rome, tr. J.-M. Gleize
Thomas de Vio CajetanStoria del pensiero - reviewer : Bruno Clarot s.j.
L'éditeur-traducteur J.M. Gleize fait remarquer que cet ouvrage a fondé la théologie de l'Église, alors qu'auparavant seul le droit canon s'occupait de l'Église comme telle. Il part des données de la foi et les fonde en raison. Ce type de théologie de l'Église va se développer les siècles suivants et préparer la définition de l'infaillibilité pontificale à Vatican I. Selon J.M.Gl., «Cajetan a montré comment la lettre de l'Évangile n'autorise dans l'Église q'une forme unique d'institution politique: celle du gouvernement suprême d'un seul», c'est-à-dire la monarchie, et il ajoute dans sa note 20 que la collégialité n'a aucun fondement dans l'Évangile. On voit ici que J.M.Gl. est de tendance lefévriste, opposé aux «innovations» de Vatican II et à la collégialité en particulier. Il n'entend nullement se cacher et, si thèse n'avait pas suffi, un mot glissé dans son livre déclare clairement qu'il est prêtre d'Écône.
Cajetan est un grand théologien, certes, mais sa démonstration est surtout polémique et il ne s'est pratiquement basé que sur deux textes. Après sa mort, l'Esprit Saint a continué à inspirer l'Église pour la mener à la vérité tout entière. Vatican II a complété les lacunes de Vatican I sur les évêques par rapport au Pape, en partant de «tout» le NT. C'est ainsi qu'il a pu insister sur la collégialité des évêques avec le Pape, en y mettant toutes les nuances voulues. Il est bon de se rappeler qu'à Vatican I, on n'avait pas prévu de définir l'infaillibilité et qu'on n'avait donc préparé aucun texte de base dans ce sens. La majorité des Pères l'a réclamée après 3 mois (mars 1870) et le texte a donc été composé dans une certaine hâte. Le texte final précise qu'il n'y a qu'une infaillibilité, celle de «toute» l'Église, exercée par le Pape quand il proclame ex cathedra la foi de toute l'Église. Ceci laissait la porte ouverte pour la collégialité. Rappelons aussi que Vatican I a dû se séparer en 70 en septembre, suite à la guerre franco-allemande et à la prise de Rome par les troupes italiennes. Son oeuvre est donc restée inachevée et a favorisé une centralisation de plus en plus poussée du pouvoir papal au détriment du pouvoir des évêques, dont on n'avait pas précisé l'origine ni l'étendue. - B. Clarot sj