Une certaine mode s'est installée chez certains «scholars» étudiant
le christianisme antique: forcer le ton sur la violence des
relations entre l'orthodoxie et les hétérodoxies combattues par les
apologistes des premiers siècles et connues aujourd'hui, non plus
seulement par les «adversus haereses» mais à travers les sources
directes retrouvées depuis la deuxième guerre mondiale. On parlera
alors de «christianismes» au pluriel, de la «Grande Église»
(laquelle?) imposant son pouvoir aux églises particulières et
surtout on revendique la qualité de «chrétien» à des courants de
pensée, gnostiques en particulier, dès lors que le nom de Christ
apparaît dans leurs écrits. La question christologique est au coeur
de ces conflits, mais elle n'est pas la seule: théodicée et
anthropologie sont en jeu, comme la réception du canon des
Écritures. Un principe est sous-jacent: il n'y aurait pas à
rechercher un donné objectif de la foi chrétienne dans la
révélation biblique; l'orthodoxie se serait construite en fonction
des enjeux de pouvoir. Il n'est pas sûr que le livre de B.E. aide
réellement à se retrouver dans le foisonnement de ces questions en
raison de ce présupposé qui relativise le rapport entre Écriture et
tradition. - A. Massie sj