Le sous-titre de ce livre annonce l'enjeu, et l'A. lui-même précise
sa méthode : « Le but avoué est de procéder par répétitions, afin
de mâchonner la Parole de Dieu jusqu'à en extraire le sens intime
(…). On peut gager qu'à terme, mais seulement le moment venu,
l'étonnante finalité prophétique du Livre de
Ruth se laissera deviner… » (p. 43). Le résultat est
probant : d'abord une première vision d'ensemble, notamment avec le
poème de Victor Hugo intitulé Booz endormi, et la lecture
nuptiale de Paul Claudel ; puis l'A. lit à trois reprises le livre
en lui-même, de plus en plus profondément ; ensuite viennent
successivement les enjeux du livre, le contexte de rédaction et les
clés de lecture. La concl. va au coeur de ce petit livre si riche ;
Noémi (la gracieuse) manifeste la faillite de l'exil - faillite de
l'Alliance - au point qu'elle demande, à son retour en terre
promise, qu'on l'appelle Mara (amère) comme l'eau imbuvable sur les
chemins de l'Exode. Ruth est figure prophétique : « des païens,
après avoir découvert que Dieu a fait Alliance avec son peuple,
accompagnent Israël dans son retour d'exil et deviennent des
prosélytes exemplaires. Orpa, elle, incarne les païens qui ont bien
reçu, par la présence des déportés d'Israël en exil à Babylone,
l'annonce des promesses messianiques, mais qui résistent à l'idée
que Dieu puisse prendre la liberté de choisir les uns et non les
autres » (p. 96). Finalement, on comprend que Ruth est figure
de la Vierge Marie (chasteté) tandis que Booz est figure de Joseph
(don total par contraste au plus
proche goël anonyme et intéressé). Leur fils
Obed sera le grand-père du Messie. « « En pure perte de
soi », Booz apprend à qui veut l'entendre que c'est la
définition même de l'Amour en Dieu et de l'amour en l'homme »
(p. 100). - V. Fabre