Omniprésente dans le monde hindou, la pratique du pèlerinage a
beaucoup contribué au sentiment d'appartenance culturelle et
religieuse qui traverse le sous-continent indien. Ce qui semble
déterminant, c'est moins le voyage que la visite d'un lieu ou d'un
espace lié à une présence surnaturelle (divinité, sage ou ascète)
et considéré comme purifiant, protecteur, source de bienfaits
matériels et spirituels voire de libération définitive pour le
pèlerin, ses proches, ses ascendants défunts. Absente des textes
védiques, la pratique du pèlerinage semble se développer durant les
premiers siècles de notre ère. Parmi les facteurs probables de cet
essor, on cite, outre l'existence de cultes locaux en voie
d'intégration à l'hindouisme brahmanique, la concurrence du
bouddhisme, la perte de prestige des sacrifices védiques ainsi que
le déclin de la civilisation urbaine et la recherche de ressources
nouvelles pour la classe des brahmanes. À la différence de l'islam
par exemple, on observe une grande pluralité de lieux saints qui,
depuis des siècles parfois, n'hésitent pas à pratiquer une
publicité comparative pour attirer les foules. Si l'effort
ascétique et les dispositions intérieures ne sont pas ignorés, la
puissance du lieu semble mettre le salut à la portée de tout
visiteur. Aujourd'hui, les moyens de transport et l'explosion
démographique multiplient le nombre des fidèles tandis que la
pollution des eaux sacrées ou l'instrumentalisation politique
risquent de mettre en péril certaines pratiques voire l'esprit même
du pèlerinage.
Bien documentée, cette étude se fonde sur les textes traditionnels
ainsi que sur de nombreuses recherches historiques, archéologiques
et anthropologiques. Une vingtaine de photos choisies complètent
utilement un exposé substantiel dont on regrettera toutefois le
caractère quelque peu répétitif. - J. Scheuer sj