Le scepticisme des religions, dont le créationnisme est la manifestation la plus actuelle, exprimé à l'égard de ces sciences qui «bousculent et inquiètent» ne doit pas cesser de nous inquiéter. La contribution de D. Lambert, consacrée à une typologie des rapports entre la philosophie et les sciences, surprend surtout par l'annonce de la possibilité d'établir, entre les discours scientifiques et théologiques, un lien de cohérence au niveau de leurs structures philosophiques respectives, plutôt que de les articuler par la médiation d'un troisième discours qui leur reste extérieur. Affaire à suivre donc! Attentif à souligner également l'enjeu moral du créationnisme, J.-M. Balhan nous offre une brève synthèse historique très réussie de sa version américaine, avant de poursuivre par une étude plus détaillée du créationnisme turc qui s'en est inspiré. Il fait remarquer, avec justesse, que la stratégie des athées aussi bien que celle des conservateurs résulte d'une même intériorisation de la conception positiviste de la science et donc de la tragique ignorance de sa véritable portée. Adoptant un point de vue résolument historique, O. Perru retrace la réception française des théories de l'évolution au xixe s. par des scientifiques (Flourens et Quatrefages) et par des chrétiens (Mgr d'Hulst et les congrès des savants catholiques). Nous aurions aimé qu'il se consacre exclusivement à la seconde partie (indépendante de la première), puisqu'elle présente l'intérêt de mettre en évidence les risques et les difficultés des tentatives catholiques d'appropriation de la nouvelle théorie, mais également l'opportunité de développer, à cette occasion, une lecture renouvelée des récits bibliques de la création. Enfin, par une contribution brève, mais particulièrement suggestive, F. Euvé nous invite à ne pas nous débarrasser coûte que coûte de la soi-disant contradiction entre science et théologie, car ce serait se priver d'une féconde «contrariété dynamique» susceptible d'aider chacune des deux disciplines concernées à devenir plus authentiquement ce qu'elle doit être. À cet effet, il commente l'inspirante proposition de Jean-Paul ii selon laquelle «la science peut purifier la religion de l'erreur et de la superstition; la religion peut purifier la science de l'idolâtrie et des faux absolus». En opposition à ce doute et à ce scepticisme résultant d'une attitude de méfiance, ce volume collectif s'achève donc heureusement par l'invitation faite aux religions d'accompagner avec confiance, «une confiance certes critique, mais une confiance quand même», l'aventure des sciences et de la raison. - J.-F. Stoffel

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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