Il lança aussitôt une pastorale nouvelle, celle de la culture moderne, pour réconcilier foi et culture humaine en formant des personnalités chrétiennes solides, unifiées de l'intérieur. S. Thomas revu et modernisé par Maritain leur servit de guide contre le subjectivisme ambiant. En 1931, pour lui-même et ses plus fidèles disciples, Montini rédigea une règle de vie, spiritus veritatis, afin d'arriver à la sainteté à travers l'étude et la recherche. Il poussa l'idée de «charité intellectuelle» selon Gratry, Sertillanges et Newman pour répandre la vérité autour de soi. Pour lui, la foi est recherche, conquête, énergie, amour de Dieu avec notre intelligence et notre coeur.
Les intellectuels chrétiens doivent être en mesure de répondre aux grandes questions des hommes contemporains. Aussi en 1928, à l'intention des aumôniers de la FUCI, Montini publie un Cours religieux à proposer aux cercles d'étude, dans lesquels il expose les idées des grands auteurs catholiques français et allemands: Lagrange, Prat, Lebreton, de Grandmaison, Cavallera, K. Adam, Guardini… Il étudie saint Paul et l'expose aux fucini dans une série d'articles. Il pousse l'amour de la liturgie qui nous fait communier au Christ et à la communauté chrétienne tout en éduquant notre foi. Il insiste sur un point alors trop oublié: l'importance des fêtes de Pâques et de la Pentecôte. Il a l'ambition de rendre la théologie accessible à la sensibilité et à la mentalité modernes, et souhaite une apologétique plus constructive pour repenser le message chrétien en l'adaptant à notre temps. Il regrette la pauvreté de la production spirituelle italienne et fonde une maison d'édition, Studium, pour publier des ouvrages italiens et étrangers de valeur et continuer l'esprit de la FUCI au cas où les fascistes auraient supprimé le mouvement. Il désirait rénover l'Église de l'intérieur avec amour et fidélité tout en tolérant ses imperfections.
Dans le climat spirituel italien de l'époque, toutes ces idées enchantaient les jeunes étudiants soucieux d'un vrai renouveau, mais suscitèrent de nombreuses critiques internes et externes. On lui reprochait de trop puiser ses idées à l'étranger, de négliger le rosaire et les dévotions populaires éprouvées. Les jésuites auraient souhaité regrouper tous les étudiants catholiques de Rome dans leurs Congrégations mariales et regrettaient le peu d'estime de Montini pour les Exercices Spirituels. Enfin, nommé en 1932, le nouveau Cardinal-Vicaire de Rome pensait que Montini empiétait sur son domaine épiscopal en parlant de la liturgie et des fêtes liturgiques et poussait trop une formation élitiste et intellectualiste. Devant ces attaques des conservateurs, Montini donna sa démission en 1933.
Ce volume reprend tous ses écrits à la FUCI parus dans différentes revues et puise dans ses archives personnelles, mais exclut les textes liturgiques, qui vont paraître à part, et ses schémas de Cours religieux. On trouve aussi deux Appendices dont un sur les circonstances entourant sa démission. Ces écrits révèlent les traits fondamentaux du jeune prêtre Montini et font mieux comprendre sa personnalité. - B. Clarot sj