Sortir ! Manifeste à l'usage des premiers chrétiens, préf. J.-B. Nadler et F. de Leyritz

Natalia Trouiller
Spiritualità - reviewer : Alban Massie s.j.

Natalia Trouiller, communicante qui a notamment travaillé pour le diocèse de Lyon, n’a pas eu peur de déranger les esprits catholiques, les classiques autant que les progressistes, pour les engager dans la voie d’une pastorale de l’incarnation. Il s’agit pour elle de prendre au sérieux le diagnostic posé par le pape François à plusieurs reprises (mais déjà par Jean-Paul ii et par Benoît xvi) : la tentation à laquelle succombent trop facilement les chrétiens, à la remorque de nos contemporains, est double et peut être caractérisée à la fois par le danger du gnosticisme et par celui du pélagianisme. Du premier, on soulignera la peur de la chair comme lieu du salut et on récusera dès lors un christianisme d’idées, éthéré. Dans le second, on reconnaît l’oubli de la grâce qui vient toucher le plus charnel de nos vies et vient sanctifier nos actions. Halte à l’activisme qui oublie que Dieu nous sauve : « Le corps n’est pas ce qui nous entraîne au péché » (p. 119).

Davantage que la Parole de Dieu elle-même, l’A. relit la tradition ecclésiale qui a incarné cette Parole : comment les premiers chrétiens, que nous connaissons par les Pères Apologistes notamment, ont-ils christianisé la culture ou les mentalités païennes ? Quelle attitude prendre dans le contexte actuel où le souvenir d’une improbable « chrétienté » n’est certes pas opératoire ? La troisième partie de l’ouvrage apporte des suggestions très concrètes. Décléricaliser : les laïcs peuvent très bien assurer les baptêmes qui seront alors de vraies entrées dans l’Église. De même pour les mariages : « marions-nous sans prêtres » (sous-entendu : prenons au sérieux le sacerdoce baptismal qui fait des époux les ministres de leur mariage). Prendre soin des morts, de leurs corps : retrouver le sens des veillées funèbres. Donner sa place au prêtre : il est le « médecin des âmes », à côté d’équipes pastorales capables de soulager les psychès malades de nos concitoyens. Investir les espaces de décisions publiques… En d’autres termes (provocateurs, comme l’ensemble du livre) : « ré-enfouissons-nous localement ». Soyons levain dans la pâte. Il donne son goût au pain ! Un ouvrage au fondement solide, qui revigorera les conseils pastoraux et pourra guérir du désespoir ceux qui s’imaginent comme les « derniers chrétiens ». Le christianisme ne fait que commencer, disaient Alexandre Men et le Card. Lustiger. On le croit volontiers. — A. Massie s.j.

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La NRT est une revue trimestrielle publiée par un groupe de professeurs de théologie, sous la responsabilité de la Compagnie de Jésus à Bruxelles.

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