Dans le quatrième des huit tomes de son Histoire des idées
politiques (le 22e volume d' Opera Omnia qui en compteront
34), Eric Voegelin (1901-1985), philosophe allemand émigré aux
États-Unis, analysant l'effondrement de l'unité temporelle et
spirituelle de la chrétienté impériale, recherche les racines des
idéologies politiques modernes dans le double courant de la
Renaissance (Machiavel et son mythe du héros païen fermé à la
transcendance, Érasme et son prince qui incarne le Grand
Philosophe, More dont l'utopie renferme en germe le colonialisme,
l'impérialisme colonial, le National Socialisme, le communisme…) et
de la Réforme (Luther et son antiphilosophisme, Calvin et son
projet d'Église universelle). L'A montre la continuité
substantielle entre le spiritualisme chrétien du haut Moyen-Age et
l'humanisme de la Renaissance. Il suggère différentes influences
orientales (vie de Tamerlan, Denys l'Aéropagite…); la rupture
luthérienne est présentée comme une conséquence du schisme grec. À
propos des mouvements sectariens, il relève la force et les limites
de la «capacité d'absorption» de l'Église. Les éditeurs mentionnent
en note les études d'auteurs plus récents, susceptibles d'affiner
la position qui était celle de l'A. il y a un demi-siècle et qu'il
ne présentait pas comme irréformable. L'ouvrage n'a pas de
conclusion: l'histoire continue. - P.-G.D.