Il est difficile de parler de Dieu. La théologie est une des
manières d'en parler. Ce livre reprend un cours universitaire
professé à Lyon, avec une démarche en deux temps: explorer la
question de Dieu à partir de la mort résurrection de Jésus, puis
chercher à repérer le développement du monothéisme chrétien sous sa
forme trinitaire, spécialement à la lumière du thomisme et de la
notion de relation, en sachant que c'est là une des méthodes pour
essayer de rendre compte du mystère révélé de la Trinité. D.
Gonneaud part du premier discours de Pierre après la Pentecôte, qui
est une révélation de la Trinité. Il note que les Écritures sont
une suite d'interprétations du passé par le présent, dans un
va-et-vient permanent. Essayant de comprendre l'expérience pascale
à travers l'analogie de l'amitié, qui dit quelque chose du mystère
de Dieu, il développe cette idée à travers la résurrection de son
ami Lazare, où Jésus révèle son identité. Amitié dit réciprocité
consciente et acceptée, gratuité et nouveauté. L'amitié est un lieu
privilégié pour nous poser aujourd'hui la question de Dieu avec son
absence de certitudes immédiates. La seconde partie est théologique
et s'efforce d'articuler théologie et «économie » en Dieu. Dieu
s'est révélé comme Amour, lequel est unité par la différence (et
non pas «malgré» ou «dans» la différence). L'A. passe alors à la
théologie scolastique qui, vers 1240, a redécouvert chez Aristote
une méthode nouvelle pour systématiser la pensée si variée des
Pères de l'Église. Selon saint Thomas, Dieu est relation
subsistante et parfaite simplicité de l'essence, altérité dans
l'intériorité. Seule la relation différencie les Personnes. La
théorie thomiste, différente de celle de Bonaventure, lui permet
d'aborder quatre difficultés: les appropriations trinitaires, les
analogies trinitaires, le «Filioque» et les quatre relations
trinitaires. Après avoir traité ces points, Gonneaud ajoute que,
pour saint Thomas, la transcendance réside dans sa parfaite
simplicité et ceci mène à des conclusions théologiques importantes;
en effet, la complexité de l'homme est source de son désir
«naturel» de devenir dieu en se réalisant par son essence propre et
ce désir fonde toute la morale. Ce désir n'est pas «exigence», car
il reste don divin gratuit, comme dans l'amitié. Les cinq «voies»
de saint Thomas n'aboutissent pas à une définition de Dieu, mais à
des orientations à partir de l'expérience du cosmos. Par
l'analogie, la raison peut scruter le mystère divin de la Trinité
révélée. Si Dieu est Amour, dit Gonneaud, il ne suit pas que
l'amour soit divin et unifie la Trinité, sous peine d'arriver à
trois dieux unis par l'amour… L'Esprit unit et distancie le Père et
le Fils (il ne se confond pas avec la relation Père-Fils et Fils-
Père). L'A. termine par une des interprétations possibles de
l'icône trinitaire de Roublev et n'hésite pas à asseoir le Père à
la droite du Fils!… Puis il offre une excellente bibliographie
sélective et commentée. Gonneaud essaye de mettre à la portée du
grand public un sujet difficile, sans cacher les questions
irrésolues. Sa comparaison avec l'amitié peut apporter quelque
clarté. - B. Clarot, S.J.